Sandra Contour
J’ai pas d’visite
- Indépendant
- 2024
- 27 minutes
Aux yeux de Sandra Contour, et avec du recul, 2024 apparaîtra sans doute comme l’une des années les plus marquantes de la carrière de l’artiste. L’auteure-compositrice-interprète originaire d’Alma remportait au début de l’année la dernière édition de Ma première Place des Arts, avant de participer deux mois plus tard aux incontournables Francouvertes (son élimination à la première ronde du concours-vitrine représente, d’un avis personnel, la décision la plus douteuse de la part du jury et du public de cette édition, mais bon…). Contour remet une couche d’actualité en ce mois de mai en faisant paraître son premier long jeu, J’ai pas d’visite.
L’album s’ouvre sur Comme un avion de papier, court morceau en formule guitare-voix portant sur l’amour éphémère et sur la peur de perdre l’autre. Dès les premières secondes d’Une heure et quart, deuxième titre du projet, la composition accueille un piano, mais surtout un ensemble à cordes. L’accompagnement rappelle grandement le Nick Drake de Five Leaves Left. Sandra Contour décide de ne pas s’enfermer dans le folk et son instrument uniquement, et pour le mieux : un disque composé uniquement d’un duo guitare-voix, à moins de proposer les meilleurs textes de l’histoire de la musique, ça peut rapidement devenir un peu long.
Rêver c’est pour les autres s’inspire des codes manouches, la musique semble tout droit sortie d’une chanson lente de Django Reinhardt, Onégile est à la fois trad et psychédélique, alors qu’Où est passé mon contour renvoie dans une moindre mesure à la chanson française, à cette manière qu’avait Brassens de jouer de la guitare.
Si l’instrumentation de l’album de Sandra Contour est plutôt sobre, les textes sont quant à eux chargés et profondément imagés. Parfois un peu trop, il est dur de suivre l’artiste sur une poignée de chansons de l’album, notamment Bienheureux sont les ignorants ou Où est passé mon contour, tant le vocabulaire est atypique et les phrases souvent farfelues. Le paramètre la rend unique, ça, on ne peut le lui enlever. L’auditeur parvient tout de même à retirer des textes de ses chansons un point d’ancrage, les relations humaines.
L’excellent et doux L’amour au temps du confinement, à la suite d’accords qui peut rappeler à certains le mythique Blackbird de McCartney, et J’avais pas mon téléphone sont particulièrement ancrés dans leur temps. Cette deuxième chanson citée s’attaque à l’universel concept de rupture, mais en établissant un parallèle original entre la défunte relation et un téléphone. Si Contour n’a pas pris de photo d’un moment avec son ex, c’est comme si le souvenir n’existait plus, chante-t-elle dans le morceau. Ingénieux et poétique.
Pour un premier album, c’est une réussite : le potentiel de Contour, encore à l’aube d’une carrière naissante, semble réellement haut.