Critiques

ORA

Motile cilia

  • Mikroclimat
  • 2022
  • 22 minutes
7,5

ORA est le nom que porte la collaboration entre les artistes sonores montréalais / Tiohtià:ke Stéphanie Castonguay et Maxime Corbeil-Perron, les deux actifs sur la scène expérimentale internationale depuis plusieurs années. Castonguay a développé son propre univers en musique DIY, à démonter de petits appareils électroniques pour modifier les circuits de manière à générer de la matière sonore, et des trames musicales technologiques. Corbeil-Perron a commencé par se démarquer en composition électroacoustique, et plus récemment en réalisation de vidéomusiques et animations expérimentales, en explorant les liens entre les technologies obsolètes / vintage et contemporaines.

Dans le cadre de Motile cilia (cils motiles, en biologie cellulaire), Castonguay est aux commandes de générateurs et senseurs de champs électromagnétiques et de synthétiseurs, tandis que Corbeil-Perron performe sur la guitare et le piano préparés, la boîte à rythmes et plus de synthétiseurs. Dans ces conditions, on se doute que le résultat soit expérimental, mais on découvre dès la première écoute un flot, un fil conducteur qui réunit le rock expérimental avec des connectiques trafiquées pour mener à une trame immersive post-industrielle.

La performance se matérialise en forme de filaments de vielle à roue qui s’épaississent, et se regroupent à l’unisson pour ensuite se décupler en chœur de guitares pleureuses modifiées en sirène de train. La masse s’ancre dans le sol avec un bourdonnement dans les basses, comme un avion qui plane au-dessus, mais résonne en dessous. Les percussions marquent une transition vers une séquence un peu plus bruitée, ponctuée par une alarme répétitive et un effet de polissage de fréquences.

Ça se poursuit dans une direction complètement expérimentale et imprévisible centrée sur l’alarme, devenant presque agressive rendu là, jusqu’à un point de rupture qui se résolve à l’orgue. La guitare désaccordée remplace le tout dans un solo épique célébrant l’inharmonie dans toute sa distorsion.

Le mouvement fait place à une pulsation sur deux notes qui résonne en avant des filaments de vielle à roue entendus au tout début. Ça devient étonnement mélodieux à partir du mouvement au piano qui équilibre la pièce entière et résout le thème en finale méditative.

C’est ce que l’on retient en premier lorsque Motile cilia se termine, la conclusion très réussie d’un flot qui passe par différents points de tension, dont un particulièrement déconstruit. On en ressent certainement une satisfaction bien que la qualité de la création donne envie qu’il y ait une suite, tel un Shine on you crazy diamond post-toute. Néanmoins, la performance se tient très bien à elle seule et donne un aperçu captivant de ce que le duo peut créer comme univers sonore.

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