Ofer Pelz et Preston Beebe
Whim
- Kohlenstoff Records
- 2016
- 43 minutes
Les Montréalais Ofer Pelz et Preston Beebe sont deux compositeurs de musique électroacoustique dont la feuille de route bien remplie nous a menés cet été à leur première collaboration offerte sur un album intitulé Whim. Pour l’occasion, Pelz a utilisé un piano préparé (dont le son est altéré par l’ajout d’objets sur certaines cordes) et Beebe s’est installé à la batterie et aux percussions pour nous offrir une expérience sonore qui remanie l’espace et le temps. Les «répétitions instables» de Pelz et les rythmes un peu «foley» de Beebe placent l’imprévisibilité à l’avant, et jouent savamment sur le niveau d’anticipation de chaque instant.
La pièce titre ouvre sur une atmosphère de scène théâtrale occupée par des clowns maladroits. Le piano résonne entre la touche jouée et les cordes manipulées, les percussions semblent prises dans un tourbillon frénétique, comme s’il fallait mettre/ramasser la table le plus rapidement possible. Ça se précise par la suite avec les notes claires et le vent percussif, la tension monte pour conclure sur la frénésie du début. Springs se torsade, varie en tension, et résonne parfois comme un ressort harmonique, parfois comme un grincement métallique. La performance a une sonorité industrielle expérimentale, très proche de la matière première et de ses ondes dissonantes.
Cracks prend lentement son souffle dans les notes graves du piano. La vibration métallique revient dissoner jusqu’à ce qu’un jeu de pincement et d’étirement de cordes nous amène dans un mouvement élastique. Le frottement des cordes fait penser à de la slide guitar, ou slide piano, et mène à une deuxième moitié bruitée, comme des insectes dans un dessin animé vintage. Daze est ponctuée de glissandos et de courtes improvisations soutenus à la batterie par un rythme passant du free jazz au numéro acrobatique. La pièce plane ensuite sur les notes aiguës et le frottement des fils métalliques torsadés.
Melting Glass reste d’abord dans les basses, avec son filament étouffé qui s’élève de temps en temps pendant que le piano marche sur la pointe des pieds. Chaque événement réverbère avec clarté et crée tranquillement un dialogue avec le silence. Seeds reprend la forme bruitée un peu frénétique, le jeu est plus serré et la façon de tendre et détendre la ligne musicale est absolument adorable. On est dans un film muet dans lequel les instruments prennent vie et hantent les musiciens.
La première écoute de Whim laisse l’impression d’un album qui éclate en mille sons projetés dans une pièce. Par la suite, chaque performance révèle son propre souffle, sa façon de se tendre et se détendre à travers les mouvements prévus et les passages improvisés. Le dialogue entre le piano préparé et le rythme est surprenant, et peut passer de deux jazzmen qui jouent «tight» à des vibrations expérimentales réverbérées. À écouter plusieurs fois si vous souhaitez découvrir tous les sons.
MA NOTE: 7/10
Ofer Pelz et Preston Beebe
Whim
Kohlenstoff
43 minutes