Critiques

Marie Claudel

Ne parle pas aux étranges

  • Sainte Cécile
  • 2018
  • 35 minutes
7

À la fin du mois d’août, Marie Claudel lançait son premier album complet. L’artiste campivallensienne (elle aime beaucoup appuyer sur le gentilé de sa ville natale qui gagne sur pas mal tous les autres gentilés de la province) a connu des dernières années plutôt agitées. Après la sortie de Charmant fiel sous son ancien pseudonyme : MCC, elle a participé aux Francouvertes en 2017. Déjà à l’époque, ce qui frappait, c’est que malgré son jeune âge, Marie Claudel est une vieille âme.

Elle a la chaleur de la nostalgie qui contourne le regret, la rondeur de la bienveillance et refuse systématiquement le tape-à-l’œil. Marie Claudel livre avec Ne parle pas aux étranges un album honnête, presque prolétaire dans la simplicité de ses arrangements et authentique du début à la fin. On y retrouve cette fine guitariste qui tranquillement prend réellement toute la place qui lui revient.

Est-ce qu’on se voit ensemble, un duo avec Antoine Corriveau, montre bien à quel point elle se débrouille avec une guitare dans les mains. Et avec les mots. Mais on y reviendra. C’est le riff de guitare qui retient l’attention avec ses nuances, ses changements d’intensité entre les notes et le débit avec lequel Marie Claudel décide de les envoyer. Et à l’écoute de l’enregistrement, on se doute bien que tout ça est de la réelle magie qu’elle produit avec ses mains. Même Pro-tools a ses limites. Sur ledit riff est couché un texte simple, mais évocateur d’une certaine mélancolie amoureuse.

Il y a quelque chose dans la musique de Marie Claudel qui nous ramène vers le passé. Comme si on nous chantait les amours d’un autre temps où la banalité du quotidien n’avait pas d’emprise sur la réalité. Peut-être que ce sentiment qu’on retrouve à l’écoute de Ne parle pas aux étranges habite tout simplement la Campivallensienne :

La maladie du siècle depuis toujours
Ils partent sans avertir
Ils quittent d’un coup

Revenez-moi après tout le temps qu’on a passé
Après la tempête vous vous êtes poussés

— La maladie du siècle

Tout ceci ne veut pas dire que l’espoir est complètement évacué. Il y a un effort de tordre le cou à la réalité en réclamant de la justice. C’est le cas de Ce n’est pas écrit qui refuse l’immuabilité des situations déplaisantes.

Est-ce que tout est parfait sur Ne parle pas aux étranges? Non. Il y a une certaine redite dans les mélodies vocales qui restent dans le même spectre et qu’on souhaiterait plus aventureuse par moment. Du côté de la réalisation, ça aurait pu aussi être un peu plus audacieux. C’est un opus qui reste très sage d’un bout à l’autre.

Ça demeure un très bon premier album pour Marie Claudel qui commence à faire entendre sa voix sur la scène musicale québécoise. Une belle voix folk doublée d’une solide guitariste, c’est un bien bon début. Ne parle pas aux étranges arrive juste à temps pour l’automne et sera encore plus à propos quand l’orangé aura pris sa place.

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