Julia Holter
Loud City Song
- Domino Records
- 2013
- 44 minutes
Julia Shammas Holter est une auteure-compositrice-interprète américaine résidente de la ville de Los Angeles. Elle avait positionné sur le marché deux offrandes sérieusement prisées par la critique: Tragedy parue en 2011 et Ekstasis révélée en 2012. Évoluant dans le même registre sonore que Julianna Barwick et Grouper, Julia Holter s’inspire également de fiables locomotives musicales telles que Laurie Anderson et Kate Bush. Elle est de retour avec son troisième effort intitulé Loud City Song.
Holter parachute un album fort ambitieux, qui puise son influence au sein d’une nouvelle écrite en 1944 par la romancière française Colette, et qui met en relief la relation douce-amère qu’elle entretient avec la Cité des Anges. Si la tentative antérieure lorgnait davantage vers une paroi plus électronique, ce Loud City Song se veut tout aussi aérien, mais superbement garni de plusieurs salves d’instrumentations grandioses et frémissantes. Un disque beaucoup plus varié qu’Ekstasis… et qui confirme sans hésitation le grand talent de compositrice que détient Holter.
Pour vous aider à y voir clair, la Californienne nous présente une sitedemo.cauction de pop expérimentale qui renferme de délicieux moments discrets (comme sur le Spirit Of Eden de Talk Talk par exemple), des décharges sonores grandiloquentes et une interprétation remémorant parfois une Björk sous sédatif… et ce n’est rien de péjoratif! Cette conception sonore joue merveilleusement avec les contrastes, et ce, sans perdre une seule once d’intelligibilité.
En plus des pianos, cordes, cuivres, claviers et rythmes tribaux épisodiques (mais tellement opérants) qui surviennent aux moments opportuns, Holter sait exprimer une réelle sensibilité, malgré la froideur incontestable de son œuvre. Sur ce Loud City Song, l’émotion côtoie astucieusement l’ambition; et il faut beaucoup de talent afin de conserver l’équilibre entre ces deux pôles. Holter aurait pu sombrer dans un sentimentalisme pathétique ou encore dans une pédanterie insupportable. Rien de tout cela ne survient pour le grand plaisir de nos conduits auditifs!
Une élaboration sonore qui se bonifie minutieusement au fil des écoutes et qui nous laisse une impression d’intemporalité exemplaire; le type d’album qui pourrait passer aisément l’épreuve du temps. Quelques morceaux se sont dévoilés au cours des nombreuses auditions accordées à cet opus: la magistrale Maxim’s I, la ligne de contrebasse dans In The Green Wild, la dépouillée et prenante Hello Stranger, l’enchevêtrement cordes/rythmes martiaux/dissonances «cuivresques» à la John Coltrane dans Maxim’s II (pièce phare de l’album), la pianistique He’s Running Through My Eyes, la pop orchestrale This Is A True Heart de même que l’éthérée City Appearing.
Loud City Song est éclectique (le grand déploiement avoisinant l’austérité musicale) et Julia Holter réussit habilement à nous faire passer par toute la gamme des émotions tout en demeurant étonnamment limpide. Elle repousse les frontières de son talent et fait la preuve qu’elle est loin d’être un feu de paille. De toute beauté!
Ma note : 8/10
Julia Holter
Loud City Song
Domino Records
44 minutes
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