Clara Luciani
Cœur
- Romance Musique
- 2021
- 37 minutes
Clara Luciani a connu une ascension par étape. Venant d’abord d’un milieu plus marginal, son goût pour la pop a fini par prendre une part importante dans ses créations. Malgré la pression de composer des tubes pour la radio et réussir à soutenir le niveau du célébré Sainte-Victoire, Clara Luciani a fait ce que toute bonne autrice-compositrice-interprète de talent qui se respecte fait : elle a écrit de solides chansons.
Je ne peux pas oublier ton cul et le grain de beauté perdu
Sur ton pouce et la peau de ton dos
Le reste, je te le laisse mais je retiens en laisse
Le souvenir ému de ton corps nu
Cœur démontre à quel point Luciani est au top de la joute. Trop souvent, la pop nous sert des textes sirupeux, ou encore un peu vide, pour laisser toute la place à la mélodie et aux arrangements. Ici, nous avons droit à la totale : textes aux sujets variés, bien construits, en dehors des lieux communs et poétiques, mélodies intoxicantes et instrumentation exemplaire. Clara Luciani frappe un coup de circuit.
La chanson-titre de l’album, qui est aussi la première, donne rapidement le ton : une chanson qui parle de violence conjugale, un air accrocheur, une instrumentation disco qui flirte même avec le disco-punk. Cette batterie va beaucoup trop vite pour être dans un disco « classique ». Le résultat est le même : l’envie de déhanchement se fait sentir, et ce, même si le sujet n’est pas joyeux. Même son de cloche du côté d’Amour toujours qui utilise le principe de l’effeuillage de la marguerite pour chanter le complexe concept de l’amour romantique, celui qui dure dans le temps.
À la folie (à la folie)
Passionnément (à la folie)
Un peu, beaucoup, pas du tout
Amour toujours mais pas longtempsQui des deux va dévorer l’autre le premier?
Car pour ne faire plus qu’un, il faudra laisser
Un peu, un peu de soi quelque part— Amour toujours
La frénésie et le dynamisme, dont est capable Clara Luciani, atteignent leur paroxysme sur Respire encore; pièce qui chante l’envie de s’envoyer en l’air pour oublier une histoire malheureuse. La Française rentre avec la force du lion entourée d’un chœur puissant peignant des images claires et nettes d’une soirée dans un bar, comme à la belle époque où les deux mètres de distance n’étaient pas péremptoires. Les mises en garde sont aussi invitées sur Cœur comme Le chanteur qui rappelle de ne pas tomber amoureux du frontman. Ou est-ce une mise en garde de ne pas tomber sous son charme? Mystère et boule de gomme.
Malgré tous ces airs entraînants, Clara Luciani ne se refuse pas le plaisir de l’intimité. J’sais pas plaire est d’une simplicité parfaite. Une confession à peine accompagnée d’instruments où sa voix et le texte prennent toute la place. Une complainte qui se permet de rêver au chevalier. Si celle-ci frappe dans le mille, celle qui la suit, un duo avec Julien Doré, Sad & Slow, est un peu moins intéressante. En fait, c’est un slow qu’on a entendu cent fois déjà. Le côté intéressant de la pièce est le penchant méta de la chanson qui chante ce qui se passe. Ça demeure une pièce anecdotique.
Clara Luciani livre un album qui est quasiment une leçon d’album pop. Un album bien balancé qui est à la fois personnel et universel qui chante autant la vulnérabilité que la force et qui offre d’excellents textes. Comme quoi, ce n’est pas nécessaire d’évacuer les sujets complexes pour plaire aux masses.
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