Critiques

Clap Your Hands Say Yeah

New Fragility

  • Indépendant
  • 2020
  • 41 minutes
5

2005. Sortie du premier album de la formation Clap Your Hands Say Yeah. La mouvance « hipster » bat son plein. Les nombreux blogues et médias voués à la musique indépendante s’entichent de ce groupe et le hissent rapidement au rang de nouvelle icône de l’indie-rock. C’est l’émouvante The Skin of My Yellow Country Teeth – pièce-phare de ce premier album éponyme – qui servira de locomotive vers ce succès imprévu et inespéré.

Caractérisée par la voix nasillarde et tremblotante d’Alec Ounsworth, la formation s’est ensuite attelée à la tâche pour nous offrir Some Loud Thunder (2007); une création réalisée par Dave Fridmann (The Flaming Lips, Mercury Rev, etc.) et qui n’a pas obtenu l’approbation escomptée. Depuis, Clap Your Hands Say Yeah a aligné les albums sans trop de conviction. Hysterical (2011), Only Run (2014) et The Tourist (2017) sont tous des albums qui ont confirmé le déclin de la formation.

Aujourd’hui, Alec Ounsworth mène sa barque seul, à son rythme, toujours sous la bannière Clap Your Hands Say Yeah. Près de quatre ans après la sortie de The Tourist, il nous propose New Fragility; un disque qu’il a réalisé lui-même avec l’aide du vétéran John Agnello (Dinosaur Jr., Kurt Vile). Comme tout bon artiste états-unien qui se respecte, Ounsworth s’est inspiré de la situation politique qui prévaut actuellement dans son pays. Thousand Oaks traite de la tuerie qui a eu lieu en novembre 2018 dans un bar de cette ville de l’état de la Californie. Hesitating Nation fait référence à la forte polarisation de la population américaine quant à la prochaine direction politique à prendre.

« You just don’t care

Everyone gathered round the toilet bowl »

– Hesitating Nation

Outre les subtils coups de gueule, Ounsworth nous propose un périple rempli de sagesse et de maturité. La dépression, la séparation de l’être cher, le vieillissement sont des thèmes qui s’ajoutent aux propos engagés du songwriter. Mais c’est musicalement que le bât blesse. Ounsworth emprunte les mêmes ascendants qu’il citait lors de ses débuts (Tom Waits, Modest Mouse et Talking Heads), sans les transcender, et aime mieux le confort de sa cage dorée que de remettre en question son modus operandi. New Fragility manque cruellement de conviction.

Il y a bien quelques incursions orchestrales qui viennent habilement masquer la faiblesse des chansons (Innocent Weight, CYHSY, 2005 et Went Looking for Trouble), mais des pièces comme Dee, Forgiven, Mirror Song, Where They Perform Miracles, et surtout, la conclusive If I Were More Like Jesus sont anéantis par une interprétation inutilement larmoyante d’Ounsworth.

Et ainsi va la vie dans le merveilleux monde de l’indie-rock. On porte aux nues un groupe qui n’a pas encore fait ses preuves. Les attentes deviennent alors démesurées. La pression se fait sentir. Une insuffisance imaginative s’installe sournoisement et s’accentue de parution en parution, au point où le musicien sombre dans une paralysie créative, incapable de s’extirper de sa démarche habituelle et d’atteindre les hauts standards imposés par certains médias en mal de « révolution musicale ».

On souhaite à Alec Ounsworth de poursuivre sa route avec sérénité… mais ce sera sans l’auteur de ces lignes.

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