Critiques

Chat Pile

Cool World

  • The Flenser
  • 2024
  • 44 minutes
8
Le meilleur de lca

En 2022, pendant mes vacances d’été au bord de la plage, je découvrais (sûrement en même temps que bien du monde, à moins que ce ne soit juste moi qui étais en retard) le groupe de rock et sludge métal Chat Pile avec l’album God’s Country. J’avais été captivée par leur brutalité, leurs paroles incisives et leurs scénarios horrifiques (ne vous laissez pas berner par un titre comme grimace_smoking_weed.jpeg, ce morceau est TERRIFIANT). Après un premier opus aussi marquant, une question se posait déjà sur toutes les lèvres : comment allaient-ils pouvoir se surpasser ensuite? Qu’avaient-ils en réserve pour nous?

Nous voici maintenant avec leur nouvel opus, Cool World. Et je vous préviens tout de suite : NON, le titre ne correspond pas tout à fait à l’ambiance générale de cet album, et grand bien, cela me fait. La première piste et également premier simple, I Am Dog Now, lance les hostilités (littéralement). C’est violent, c’est nihiliste, c’est cynique, bref, c’est tout ce qui fait de Chat Pile ce groupe si puissant et engagé. En revanche, dès la deuxième piste, le groupe se révèle avoir plus d’un tour dans son sac. Shame se veut être un morceau étonnamment mélodieux, mais avec des détails à faire froid dans le dos. En entendant la voix gutturale de Raygun Busch, principale vocaliste du groupe, et l’outro constituée de bruit blanc, nous réalisons que tout au long de notre écoute, l’horreur ne sera jamais vraiment derrière nous. Au contraire, elle nous suivra partout où nous tendons l’oreille.

Au fur et à mesure que l’album se développe, mon premier véritable constat s’avère être le suivant : les guitares sont hallucinantes. Chaque riff, cadeau du guitariste Luther Manhole, rugit avec ferveur et a son propre caractère, injectant une dose de mysticisme dans chaque morceau. Masc, par exemple, laisse beaucoup de place à ces guitares électriques lourdes, bruyantes et visqueuses ne laissant personne indifférent. De plus, le groupe semble perfectionner l’art de la mélodie insidieuse. Si les performances de God’s Country pouvaient faire penser à un kraken redoutable engloutissant en une bouchée un navire égaré, Cool World, c’est un peu comme une sirène voulant amadouer un marin crédule avant de l’emporter avec lui dans les abysses de la mer. En effet, Busch nous livre une pluralité de voix impressionnante : il chante, crie, lamente, marmonne, gémit et livre des performances toutes aussi torturées les unes que les autres. Le morceau Tape se veut d’ailleurs particulièrement éprouvant, avec son mantra, « It was the worst I ever saw », complètement dépourvu d’espoir.

Dans le même acabit, The New World nous plonge dans les pensées d’un homme impuissant face à un monde qui ne correspond pas à sa vision des choses. Il nous amène à nous poser la question : sommes-nous condamnés à souffrir dans ce monde, hors de portée de nos rêves? Nous restons sans réponse, mais nous en ressortons plutôt ébranlés. La batterie effrénée de Cap’n Ron rajoute un élément d’urgence et d’oppression au morceau déjà très sombre.

On en est à se demander si nous arriverons à trouver la lumière au bout du tunnel, mais à l’instar de la dernière piste de God’s Country, la dernière piste, No Way Out, est l’apothéose de la souffrance du protagoniste. Ici, il semble crier face à un tunnel qui va inévitablement se refermer devant lui, ne lui offrant aucune issue de secours. Il exprime sa désillusion totale face à ce monde cruel qui lui a été vendu comme étant beau; comme étant l’incarnation du rêve américain. Ce n’est pas pour rien que l’élément se démarquant le plus de la pochette grise et morose de l’album est une simple croix blanche, symbole religieux américain versant dans le délétère, dans un pays où l’espoir d’un avenir meilleur s’estompe d’année en année.

To be lost, to be whole, to be bought, to be sold
To losе hope, to lose God, to find hate, to find law
Most are dragged kicking and screaming out
The New World

Bref, ça fait beaucoup à encaisser. Ce qui est clair, c’est que si vous cherchiez un album horrifique à pic pour le mois d’Halloween, pas de problème : Chat Pile est là pour vous.

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