Critiques

phoenix

Charlotte Cardin

Phoenix

  • Sony Music / The Orchard
  • 2021
  • 46 minutes
8
Le meilleur de lca

Rarement a-t-on vu au Québec une artiste conquérir le public avant même d’avoir lancé un album. C’est pourtant ce que Charlotte Cardin a fait avec une facilité quasiment gênante. En 2013, elle participe à La Voix et elle ne regardera plus derrière. Depuis, elle a lancé deux EP : Main Girl et Big Boy en 2017 et 2016 respectivement. Quatre ans se sont écoulés depuis le dernier alors les attentes étaient élevées pour Phoenix.

Et Charlotte Cardin frappe dans le mille. Tout simplement. L’autrice-compositrice-interprète montréalaise livre un album pop aux mélodies efficaces avec une bonne touche de soul interprété avec justesse. Si vous cherchiez un équivalent contemporain à la Blue-Eyed Soul, Charlotte Cardin en serait le parfait porte-étendard. Même si la pop est l’approche mise de l’avant, il n’en demeure pas moins qu’il y a derrière ses refrains accrocheurs et ses élans de voix de réels sujets qui sont traités simplement, mais intelligemment.

We’re not your fancy dolls
You better set us free
Or else we’ll fuck you up

Anyone Who Loves Me 

Ce qui commence comme une ballade plutôt convenue au piano et aux arrangements déjà vus change de cap assez rapidement quand on s’attarde aux paroles. Cardin est assez claire sur ce qui arrivera si on ne la laisse pas tranquille. Dans les entrevues en marge de la sortie, Cardin a parlé beaucoup de libération et d’affranchissement du regard des autres. Il faut dire qu’elle baigne dans la lumière des projecteurs depuis ses 15 ans alors qu’elle était mannequin. La pièce-titre qui ouvre l’album installe rapidement le ton de l’album. Chose surprenante, malgré sa voix impeccable, elle fait le choix d’utiliser un tantinet d’autotune esthétiquement. Un choix intéressant fait avec classe.

Charlotte Cardin a une voix comme il s’en fait peu. Et elle sait s’en servir intelligemment. Empreinte de soul, c’est son interprétation qui lui donne encore plus de force. On sort de la prouesse technique pour entrer dans l’émotif tout naturellement. Elle le démontre sur la dépouillée Sun Goes Down (Buddy). Elle s’amuse même avec celle-ci, la modifiant sur Xoxo, et ça donne l’impression qu’elle est duo avec James Blake.

I don’t want to meet your family
Unless your big brother is into me
Sex to me
Sex to me
Say hi for me

Sex to Me

Les mélodies efficaces qui flirtent avec le convenu sans jamais s’y abandonner sont imparables. Que ce soit sur Romeo, Meaningless, Passive Agressive, Daddy ou Sex to Me, Cardin excelle dans la livraison. Elle y aborde toute sorte de thèmes avec des interprétations justes. C’est un album de fille dans la vingtaine qui cherche sa place et c’est exprimé avec intelligence, en équilibre entre la légèreté et le drame.

Elle s’est fait attendre la Cardin, mais elle livre ici un album très efficace qui lui ouvrira sans doute les portes des États-Unis et de l’Angleterre. Phoenix démontre que Charlotte Cardin est plus qu’une belle fille ou une belle voix. Il y a de la matière derrière les beaux atours. Et elle sait la communiquer avec justesse.