Critiques

Caroline

caroline

  • Rough Trade
  • 2022
  • 47 minutes
7,5

Ils sont huit. On peut y entendre un violon, une trompette et la plupart des membres de cette formation sont des multi-instrumentistes aguerris. Mis sur pied en 2017, le groupe anglais caroline a débuté son périple créatif par des séances d’improvisation plus ou moins structurées pour ensuite bifurquer vers une forme chansonnière plus conventionnelle, sans que celle-ci verse dans un classicisme convenu. De prime abord, caroline est un amalgame de post-rock et de slowcore. Ces deux genres musicaux sont ponctués par moments par de petites incursions dans le jazz, le folk appalachien et la musique ambiante.

Premier constat : la comparaison avec les compatriotes de Black Country, New Road est inévitable surtout à l’égard de la lutherie utilisée. Mais là où le comparatif se justifie moins, c’est que le septuor britannique appuie ses chansons sur des ascendants post-punk tandis que ceux de caroline sont plutôt tournés vers le post-rock. Même si des liens sonores sont à tisser entre les deux entités, caroline possède une identité bien à elle.

En lisant sur le peu d’informations qui circule au sujet du groupe, certains ont décelé, semble-t-il, une connexion sonore avec Godspeed You! Black Emperor, sans les crescendos cathartiques qui caractérisent la musique des Montréalais. Le comparatif avec Talk Talk, celui de l’album Laughing Stock, nous semble plus approprié. Une chose est sûre, la musique conçue et proposée par caroline mérite votre attention. L’album homonyme qui vient de paraître saura convaincre l’amateur d’indie rock expérimental aussi réconfortant qu’angoissant.

Dès la pièce introductive, Dark blue, les Anglais font leur marque avec un morceau superbement bien construit, basé sur un crescendo répétitif et enjolivé par un violon. Par la suite, le groupe enchaîne avec Good morning (red) qui nous propose une mixture de pop de chambre et de dream pop, recelant un je-ne-sais-quoi d’indie rock à la Pavement.

Deux pièces plus loin, la formation nous présente IWR, un morceau étonnamment accrocheur arborant les vestiges d’une certaine tradition folk britannique, mais qui recèle aussi de subtiles influences tirées de la musique classique. messen #7 et zilch sont deux intermèdes fortement teintés par l’affection de caroline, manifestée en entrevue, pour le folk appalachien, un genre dérivé de la musique violonée écossaise, de la musique africaine et du blues tirant son origine des premiers Afro-Américains.

Le point culminant de ce périple singulier est la conclusive Natural Death. S’amorçant avec un premier couplet qui alterne entre une mélodie vocale et des arrangements frémissants de cordes, on assiste ensuite à l’apparition de cymbales syncopées, d’une guitare discordante et d’un piano martelé. Une élégante cacophonie.

Un seul morceau nous semble un peu moins intéressant : Skydiving onto the library roof. Malgré sa beauté orchestrale, l’interprétation et l’exécution de cette pièce nous semblent un peu trop bâclées/improvisées pour capter pleinement notre attention.

Ce premier effort de caroline exigera de vous de la patience et une écoute attentive pour pouvoir l’apprécier à sa juste valeur. Toutefois, au fil des écoutes vous serez insidieusement conquis. Voilà un groupe détenant un potentiel créatif considérable dont il faudra suivre la trajectoire attentivement. caroline est une œuvre apaisante, parfois troublante et jamais terne.

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