Caribou
Honey
- Merge Records
- 2024
- 40 minutes
Qu’on l’appelle Manitoba, Daphni ou Caribou, l’artiste électronique, chanteur et multi-instrumentiste canadien Dan Snaith ne cesse de proposer des projets étoffés qui traversent aisément le temps. Cette fois, sous son pseudonyme principal, il nous revient avec le très dansant et mouvementé Honey; un album faste en rythmes endiablés entremêlant des éléments sonores surprenants et surprise, sa voix modifiée par l’intelligence artificielle. Le producteur de musique électronique canadien en est à son septième album et, malgré ça, il ne ralentit pas la cadence. Au contraire, Honey, ça roule dans la voix de gauche.
Avec Honey, on se rend rapidement compte de l’efficacité des titres qui se suivent et de l’influence plus dansante de Daphni, son autre personnage de scène. Du côté du ton, ça contraste avec Suddenly, le dernier long jeu de Caribou. Il suffit de comparer les deux chansons d’ouverture. Alors que l’émotif Suddenly abordait des thématiques plus difficiles et survenait pendant une période trouble de la vie de Snaith, Honey est aux antipodes et le résultat est euphorisant.
Dans les mois qui ont précédé la sortie de l’album, Snaith avait présenté plusieurs chansons qui allaient figurer sur le projet. Peut-être trop aux yeux de certains détracteurs qui anticipaient un assemblage de chansons disparates sans lien les unes avec les autres. Il n’en est rien. Le résultat est logique et réussi. Les pistes se succèdent et offrent des montées abruptes qui mènent vers des descentes exaltantes.
L’album démarre sur les chapeaux de roue avec les sautillantes Broke My Heart et Honey. On peut notamment y entendre cette influence de l’intelligence artificielle. En soi, Snaith a eu recours à l’IA afin de modifier la tonalité de sa voix qu’il utilise pour quelques-unes des pièces. Ces voix régularisées par l’IA reviendront ici et là au cours du projet.
On prend un peu de répit le temps de Volume et de Do Without You, deux chansons un peu interchangeables, pour se replonger dans l’univers effervescent de Caribou avec l’excellente Come Find Me qui va puiser dans la french touch. Ses synthétiseurs retentissants et sa mélodie nostalgique placent la cinquième piste comme chanson importante du projet.
Lorsque Caribou utilise ses nouvelles voix, le registre aigu fonctionne pour la majorité du projet, notamment sur les pistes nommées plus haut. Cependant, le résultat est moins concluant pour Campfire sur laquelle, il s’attribue une voix plus grave qu’il utilise dans un couplet à saveur hip-hop. C’est un peu maladroit et risqué. Dans un album où l’énergie est à son paroxysme, Campfire ralentit un peu les ardeurs. Heureusement que la suivante, Climbing, à l’influence daftpunkienne, reprend les rênes et remet la machine en marche.
Le projet se conclut avec le crescendo réussi de Got to Change. Le son des synthétiseurs est agencé avec les itérations entrecoupées de la voix artificiellement modifiée de Snaith. Cette dernière piste et sa montée s’arrêtent brusquement et nous déposent face à la quarantaine de minutes qu’on vient de vivre et qu’on a envie de recommencer.
Honey, c’est un album digeste, peut-être plus simple que ce à quoi Dan Snaith a habitué ses admirateurs, mais dansant et définitivement jouissif. On sent que l’artiste s’est amusé pendant la création et on n’a pas de misère à s’imaginer suant en se déhanchant au rythme de ses chansons. À l’exception de quelques-unes d’entre elles, chacune des pistes de l’album est unique. Honey s’écoute sans modération et nous rappelle, encore une fois, que Caribou n’est pas un pilier de la musique électronique par hasard.