Osheaga 2025 | Jour 3: Olivia Rodrigo, Jamie XX, Cage The Elephant, Chet Faker, The Beaches et Rau_Ze
La petite équipe du Canal Auditif, formée des scribes Nadine Mathurin et Siméon Dumont et de la photographe Alexanne Brisson, n’allait pas manquer la troisième et dernière journée d’Osheaga 2025! En avant la musique!
Photos: Alexanne Brisson. (Retrouvez ses superbes photos dans la galerie ci-bas)
Rau_Ze
Nadine: On remet ça pour une troisième et dernière journée de festival en cet enfumé-et-orangé-dimanche-aux-airs-de-fin-du-monde en commençant avec Rau_Ze, seul groupe québécois programmé sur une « grande » scène cette année.
Ceux qui ont lu mon texte sur la journée de samedi ont lu ma critique pas très positive sur les artistes seuls qui chantent sur une track…Eh bien, Rau_Ze, c’était tout le contraire! Le duo a profité de son premier passage à Osheaga pour inviter huit amis avec lui sur scène, créant un beau chaos organisé où la chimie et la joie d’être là émanaient du stage.
Rau_Ze en show, ça déménage, pis pas à peu près! Rose Perron ne tient pas en place plus de deux secondes: elle fait des culbutes, se roule par terre, bouscule amicalement ses collègues, danse avec l’un, se pitche sur l’autre, et ce, sans jamais perdre de puissance dans la voix, c’est ce qui est sûrement le plus impressionnant de l’interprète. Les interactions de la chanteuse avec le public sont toutes plus sympathiques les unes que les autres, on embarque aisément dans la belle folie du groupe et le show se termine en se disant qu’on en aurait pris bien plus.
Grain de sel de Siméon : Le groupe a livré une performance convaincante, en début de journée, devant une foule plutôt copieuse pour cette plage horaire. La présence sur scène d’une jolie équipe formée d’artistes de talent, comme David Marchand (zouz), Naomie de Lorimier (NNAO), Antoine Bourque et Lisandre Bourdages (comment debord, Les Shirley) a su insufflé une touche de psych-rock et de folie aux airs plus doux et jazzy de l’album Virer nos vies. En forme et en voix, la chanteuse habitait la scène, se dandinant, se roulant par terre ou s’assoyant simplement, notamment pour interpréter la magnifique Cinq minutes pile.

BigXthaPlug
Siméon Dumont: Après les prestations assez fades de Kenny Mason et Bktherula, le phénomène texan BigXthaPlug nous a remis cette troisième journée sur les rails du côté des scènes de la vallée et de la forêt. Nous promettant « le meilleur concert de tous les temps », le DJ du rappeur exagérait bien sûr, mais le colosse nous a tout de même offert une performance excitante, gracieuseté de succès, comme Mmhmm, Texas, The Largest et la chanson All The Way, collaboration country et populaire avec Bailey Zimmerman. Le flow unique de l’artiste (toutefois un peu répétitif), son aura (oui je suis un Z) et la venue du rappeur Ro$ama, qui s’est transformé en hypeman efficace, ont su plaire au large public en liesse venu voir le natif de Dallas.
Marina
Nadine: Une très grande foule attend la chanteuse britannique Marina (Lambrini Diamandis, de son nom complet), venue présenter son plus récent album, Princess of Power, paru en 2025. Plus charmeuse que performeuse, Marina enjôle par sa voix claire et puissante de mezzo-soprano, même si elle semble légèrement coincée dans son corset rose bonbon, qui a tendance à descendre plus le spectacle avance. La foule réagit particulièrement aux chansons Cuntissimo, Primadonna, mais surtout Bubblegum Bitch en finale, sorte d’hymne à la Katy Perryish de 2012, qui a récemment connu une popularité fulgurante grâce à la plateforme Tik Tok.
The Beaches
Nadine: Le groupe formé en 2013 à Toronto est un fit naturel pour mettre la table à la tête d’affiche Olivia Rodrigo, prévue plus tard en soirée.
The Beaches envoie du lourd dès le début, avec Cigarette, Takes One to Know One et Touch Myself. Ça fait tant de bien, de voir quatre femmes en pleine maîtrise de leur instrument, rocker une grande scène devant une foule plus que comblée! J’ai été très impressionnée par la meneuse Jordan Miller, hyper en forme et magnétique, rappelant parfois l’énergie badass de Jehnny Beth de Savages, autant dans l’énergie que dans la voix. La guitariste a sûrement fait plaisir à plusieurs Montréalais, arborant un t-shirt “Montreal’s Bagels Are Better Than New York’s”. On va prendre le compliment (pis être d’accord!)

The Dare
Siméon: Pas trop le temps de souffler, ça repart de l’autre côté de la clôture avec l’Américain cravaté The Dare. En énergie, Harrison Patrick Smith était en mission solitaire sur la Scène de la vallée. Ce dernier a déversé les basses intoxicantes de ses chansons dance-punk, qui n’ont pas laissé le choix aux spectateurs de se trémousser. Jetant d’agiles coups de pieds de tous les côtés de la scène, le jeune artiste, sur son 31 à l’arrivée, commençait à avoir des airs d’un garçon d’honneur éméché à la fin de mariage, et c’est parfait comme ça. Au rayon de la musique, The Dare a présenté de nombreuses chansons de son premier album What’s Wrong With New York?, comme Cheeky, Perfume et, pour finir, la très suintante Girls qui a fait un tabac sur une plateforme comme TikTok. Parle-moi d’une performance rodée qui donne envie de le revoir dans une salle sombre d’un quartier trendy new-yorkais.
Grain de sel de Nadine: Un public crinqué à bloc attend de pied ferme Harrison Patrick Smith, dit-The Dare, protégé de Charli XCX, programmé à la Scène de la Vallée en début de soirée. Avec sa dégaine nonchalante, son habituel complet-cravate, l’américain enchaîne les morceaux, passant du micro à sa console en dansant et en donnant toute l’énergie qu’il a. Entre ses chansons rappelant LCD Soundsystem ou The Rapture, l’artiste nous montre son côté un peu baveux, remercie certains fans venus vêtus de cravates noires, accusant tout le reste du public d’être “mal habillé” avec humour.
En terminant son set avec Girls, The Dare prouve qu’il est plus qu’un simple DJ derrière une console: il est un réel performeur capable de créer un vrai contact avec une foule en délire.

Amaarae
Siméon: Après le dance-punk, place à la pop alliant RnB et afrobeats de l’impressionnante Amaarae. La chanteuse ghanéenne-américaine n’a pas eu à tordre le bras à personne dans la foule avec ses morceaux envoutants. Avec le feu dans les yeux, elle a aligné des chansons connues de sa discographie, comme Angels in Tibet, Disguise et Wasted Eyes, ainsi que de nouvelles pièces qui apparaîtront sur son album BLACK STAR, disponible vendredi prochain. La chanteuse possède une présence scénique indéniable et harponne le public avec ses allocutions fortes et touchantes, comme lorsqu’elle nous parle avec éloquence des idées noires qu’elle a eues il y a quelques années, délivrant un joli message d’espoir. Ça aurait mérité une plus grande scène, avec une plus grande foule, tout ça!

Chet Faker
Siméon: Ah, ce qu’il est bon de retrouver ce cher Chet Faker! Alors qu’un immense public s’est rassemblé pour le concert de Cage The Elephant, l’Australien de peu de mots a joué, à la brunante, devant une foule moins garnie, mais aussi très heureuse d’entendre ses airs. Flanqué de nombreux musiciens sur la scène, Nick Murphy a puisé dans ses classiques, mais aussi dans des deep cuts efficaces qui accompagnaient judicieusement la lumière apocalyptique dans laquelle le parc Jean-Drapeau était plongé en raison des feux au pays.
Puis, alors que la noirceur s’est installée, le barbu a offert une succession de ses plus grands hits, comme Gold, Talk Is Cheap et sa très populaire reprise de No Diggity de Blackstreet. La diffusion du concert sur les écrans géants se faisait sous des filtres psychédéliques rappelant les motifs que l’on retrouve sur l’Autoportrait de Van Gogh. Tout ça a plongé celui qui écrit ces lignes dans un profond sentiment de nostalgie, alors que ce dernier a souvent arpenté, à bicyclette, les rues d’une banlieue quelconque, bercé par les fines mélodies indie-électro-pop de ce savant producteur.
Royel Otis
Le jeune duo australien Royel Otis démontre une réelle maturité pour son premier passage dans la métropole, fort de plusieurs spectacles à travers le monde. On comprend la popularité grandissante du groupe, ultra sympathique et visiblement muni derrière eux comme “Dance with the people next to you” (référence à I Wanna Dance With You), “Osheaga you’re so fucking gorgeous” (faisant référence à leur chanson Sofa King) et mon préféré de loin, l’absurde “Fried rice” (littéralement le titre de la toune), le groupe nous offre son répertoire indie pop-rock avec vitalité et entrain.
Alors que les photographes ont reçu la consigne de NE PAS photographier le guitariste s’il N’AVAIT PAS les cheveux devant le visage (on résume: les seules photos et vidéos qui circulent de Royel Maddell sur internet, il a les cheveux dans la face) à cause d’un problème d’estime de lui-même qu’il apprend peu à peu à gérer, on comprend rapidement que son acolyte, Otis Pavlovic, ne doit pas souffrir du même problème. Otis, chanteur du duo, a le charisme et la beauté à faire tourner toutes les têtes. Fier représentant d’une génération bienveillante, le groupe s’est arrêté deux fois de jouer en plein milieu de chansons pour s’assurer que des personnes dans le public ayant eu un malaise soient prises en charge et en sécurité. Respect.
Cage The Elephant
Toute personne ayant déjà vu Cage The Elephant en show vous dira que c’est en spectacle que le groupe prend tout son sens, tellement que son frontman, Matt Shultz, est époustouflant à regarder. À la jonction entre Nick Cave et Anthony Kiedis des Red Hot Chili Peppers, Shultz se démène pour en donner plein la vue, traversant entre les deux grandes scènes pour aller chanter au public en attente d’Olivia Rodrigo, empruntant la casquette d’une spectatrice, se chamaillant avec son frère guitariste, tout ça en livrant une performance musicalement impeccable.
On a déjà très hâte de revoir le groupe en première partie d’Oasis à Toronto plus tard ce mois-ci, et on se dit que le choix est judicieux pour réchauffer une foule prévue à 70 000 personnes.
Jamie XX
Siméon: Pendant que, sur le main stage, la reine Olivia Rodrigo cassait la baraque, plus subtilement, le DJ britannique Jamie XX offrait une alternative électro aux festivaliers en guise de nightcap. Hier, le producteur a présenté un set équipé des chansons mouvementées de son dernier album In Waves. Il nous a présenté des morceaux enchanteurs comme Waited All Night, All You Children et Baddy on The Floor. On s’est arrêté à la complexité de ses rythmes, à la variété des genres puisant notamment dans le trance et le drum’n’bass, et aux surprenantes diffusions d’un public visiblement content. Mention spéciale à la décadente Gosh et son intro remixée qui m’a soutiré de nombreux sauts, alors que j’étais pas le plus top shape. Belle façon de mettre la boucle sur cette dernière journée ça!

Olivia Rodrigo
Nadine: Considérée (avec raison) comme la plus rockstar des popstars, Olivia Rodrigo n’a que 22 ans et pourrait déjà donner des classes de maître sur la présence sur scène, le maintien du niveau d’énergie (prends des notes, Tyler The Creator!) et ce qui fait d’une musicienne une performeuse de haut niveau.
Côté succès, l’artiste n’est pas à plaindre, et c’est ce qui lui permet très tôt dans le spectacle de jouer Vampire, Drivers License et Traitor, comblant sa horde de fans qui connaît de toute façon la totalité de son répertoire par cœur. Parlant des fans, certains passages de chansons et refrains étaient pratiquement inaudibles tellement le public chantait (aigu et) fort, dans une sorte de communion où l’on sent que le propos des morceaux, dont le sujet principal est les ex, rallie comme des sentiments exutoires vécus de toustes. Même ses chansons plus pop prennent une tournure réellement rock avec son groupe, entièrement composé de femmes toutes plus talentueuses les unes que les autres, et Olivia joue et comprend les codes d’un style de musique qu’elle semble apprécier pour vrai. Généreuse et passionnée, Rodrigo interagit constamment avec ses musiciennes, les caméras ou le public, comme si celui-ci avait la capacité de détourner le regard de sa personne (la réponse, c’est non!).
Avant de terminer le spectacle, l’artiste, visiblement émue par la réception du public d’Osheaga, descend prendre un bain de foule et donne ses bijoux à quelques chanceuses au premier rang du public.
Finalement, on retient qu’Olivia Rodrigo est peut-être bien plus la plus popstar des rockstars, et on aime penser que son style puisse influencer une nouvelle génération à la découverte d’une musique qu’on pensait autrefois morte. Le rock n’est pas mort, il évolue!
































