Festival International de Jazz de Montréal 2021 : Hommage à Chick Corea, Simon Leoza et Patrick Watson
En cette soirée de clôture de la 41e édition du FIJM, c’est un hommage à l’un des précurseurs du jazz fusion, le défunt pianiste Chick Corea, qui a lancé le bal sur la Place des festivals. La suite aura plongé les spectateurs dans une atmosphère intimiste, voire introspective, alors que Simon Leoza venait présenter son plus récent opus Albatross avant de laisser place à l’irréel Patrick Watson.
Encore une fois, vous trouverez la gallerie photo complète d’Alexanne Brisson au bas de l’article avec en prime des images des concerts de Ghostly Kisses et Modibo Keita qui célébrait les 50 ans de What’s Going On de Marvin Gaye!
Hommage à Chick Corea et son album Light As A Feather (1972)
Pour ceux qui n’avaient jamais entendu parler de ce cher Chick Corea, je l’introduis ici en mentionnant qu’il a notamment été le pianiste de deux célèbres albums de Miles Davis, soit In a Silent Way (1969) et Bitches Brew (1970). Hier soir, un quatuor composé de Daniel Thouin au piano, d’Alain Caron à la basse, de Yannick Rieu au saxophone et de Paul Brochu aux percussions, a su se montrer tout simplement génial alors que ces derniers étaient accompagnés de Coral Egan, une chanteuse jazz qui ne laisse personne indifférent. Ils ont interprété avec justesse et conviction Light As A Feather, un album phare du jazz des années 70. De longues compositions imprévisibles, munies de brillantes transitions et d’une énergie incontestable qui fait bouger le corps et l’esprit dans tous les sens, voilà ce qui en est. Les musiciens sur scène étaient dans leur élément, se complétant à merveille tout en se laissant l’espace nécessaire pour briller tour à tour. Les arrangements instrumentaux sont d’ailleurs ce qui a fait rayonner ce moment, en plus du pouvoir ensorcelant de la voix de Egan qui me faisait parfois penser à celle de Mireille Dalbray dans l’album de Cortex intitulé Troupeau Bleu.
Simon Leoza
Que dire de cette sublime performance orchestrée par le jeune compositeur Simon Leoza qui, pendant plusieurs dizaines de minutes, a envoûté la foule en la plongeant confortablement dans son univers néoclassique ambiant et cinématique ? Accompagné des musicien.es qui l’ont aidé à enregistrer son plus récent album, on a senti que tout un chacun avait son mot à dire dans ce grand voyage musical contemplatif. Le pianiste, qui navigue à son aise depuis plusieurs années déjà sous le pseudonyme Tambour, vibrait sur scène. Tout au long du spectacle, on sentait naître l’espoir, une lenteur réjouissante. Dans les montées dramatiques, on se sentait voler, parés à parcourir les grands espaces sans se soucier du temps qui passe. Les sons électroniques minimalistes venaient ajouter une touche pertinente à l’ensemble organique qui se composait notamment de violons et d’un cor français. Cet éveil optimiste m’a rapidement fait penser à cette fois où j’ai assisté à la représentation de Flore Laurentienne à Pop Montréal. Du pur génie!
Patrick Watson
À chaque nouvelle présence, on ne sait jamais réellement à quoi s’attendre de la part du virtuose montréalais Patrick Watson. Chose certaine, ce dernier parvient indéniablement, et ce, chaque fois, à caresser la profondeur des sentiments au travers de ses nombreuses idées folles. La dernière fois que mon être s’immisçait dans son univers, ce dernier voguait en solo. Cette fois-ci, il était accompagné de plusieurs musiciens, dont Joe Grass, le bassiste Mishka Stein et une sublime section de cordes. Ouvrant sur la pièce Lost With You, avec à l’écran un défilé de vélos, on sentait déjà les cœurs battre la chamade, prêt à s’embarquer dans cette nouvelle aventure. Au travers de la fumée et des jeux de lumière sur une scène peuplée de bulbes lumineux, l’ensemble a tendu vers une véritable catharsis. Que ce soit au travers de la candeur du personnage Watsonien, des bruits d’oiseaux dans Big Bird In A Small Cage et des sifflements du musicien, de cet unique duo de danseurs disposés sur la scène du milieu lors de The Great Escape, de la présence de Katy Charter et de La Force, tout y était pour immortaliser ce moment grandiose. Parmi mes coups de coeur de la soirée, je note la pièce Slip Into Your Skin alors que Watson la récitait lentement, le moment où Charter, Stein et lui se sont rassemblés tout près du micro pour y jouer Melody Noir et pour clôturer le spectacle, cette superbe composition Lighthouse, jouée en solo dans le noir avec un public qui se devait d’être silencieux.
Merci le Jazz, on se revoit l’été prochain!
Crédit photo: Alexanne Brisson