Une entrevue avec Thus Owls
C’est par une douce journée aux allures printanières plutôt qu’hivernales que j’ai rencontré le couple Simon et Erika Angell. Thus Owls prendra la scène du Gésu, le 18 février prochain, dans le cadre de Montréal en Lumières. Ce spectacle revêt une importance particulière puisque le tandem y jouera les pièces de Black Matter, sorti en novembre dernier, accompagné d’une section de cordes et d’un chœur. C’est une chance unique d’entendre ces pièces avec un ensemble à grand déploiement. Le couple est particulièrement excité de se retrouver avec une formation plus que complète.
Le mini-album Black Matter a été écrit lors d’une résidence à New York offerte au groupe par un organisme suédois. Une opportunité fortement appréciée comme le mentionnait Erika: «On n’a jamais eu deux semaines de suite comme ça en résidence pour créer. C’était notre première fois et on a beaucoup aimé ça». C’est un endroit bouillonnant comme l’explique Simon: «Normalement, quand tu vas à New York, c’est pour le week-end et tu sors constamment et tu ne dors pas. Avoir deux semaines c’est bien parce que tu peux laisser la ville t’absorber. On allait voir des spectacles le soir et le matin on écrivait et composait. C’était très bien. Et l’appartement était très beau avec de grandes fenêtres qui laissaient entrer beaucoup de lumière, ce qui était très motivant».
Le duo qui normalement a une approche plus organique a décidé d’y aller pour plus d’éléments électroniques. «J’ai acheté un synthétiseur avec lequel je suis tombée en amour. Ça donne un son synthétique alors pour contrebalancer, on a voulu introduire les cordes et ramener un peu d’organique. Ce sont des sonorités que j’aime beaucoup qui sont à la fois capables de beauté et de grandes émotions, voire de dureté». La paire a trouvé aussi le travail avec Danial Bjarnason très facile. Le groupe ne l’a même pas remarqué. Simon nous parle de l’approche: «Nous avions soupé avec lui une fois en Islande avec des amis à nous, mais c’était une grande tablée et nous n’avions pas parlé. Je lui ai envoyé un courriel en lui disant, tu te souviens de moi, on s’était rencontré une fois. Il a tout de suite embarqué et les premières idées qu’il nous a envoyées dépassaient déjà nos attentes».
Plusieurs collaborateurs ont aidé à la création de Black Matter. Erika a particulièrement apprécié Pierre Girard qui «nous dit tout de suite oui ou non ou peut-être. Il n’a pas peur de s’exprimer et c’est très sitedemo.cauctif dans un processus de création». Le groupe a aussi fait appel à quelques nouveaux collaborateurs sur ce maxi. Simon nous parle de Liam O’Neill: «il a joué de la batterie bien sûr, mais il a aussi aidé avec la programmation et le côté électronique sur l’album. J’aime beaucoup Suuns. Le nouvel album est excellent et c’est plaisant de travailler avec des gens aussi créatifs».
Pendant l’entrevue, Erika a souvent mentionné l’épreuve de déracinement qu’elle a vécue lorsqu’elle et Simon sont retournés vivre une nouvelle fois à Montréal: «Je crois que c’est toujours difficile. C’est comme recommencer le secondaire… mais sans les désagréments d’être ados. Simon l’avait vécu lorsqu’il s’est installé à Stockholm et cela a beaucoup aidé pour la transition ici. Il comprenait ce que je vivais. Tu essaies de comprendre la culture et quand tu crois que tu as compris, tu te rends compte que t’avais mal compris quelque chose d’essentiel qui change tout! Et puis, tu choisis les choses que tu veux incorporer à toi et tu choisis ce qui ne t’intéresse pas. C’est un processus fascinant, mais demandant émotionnellement». Et Simon nous parle de la meilleure façon d’apprendre une nouvelle langue: «il fallait que je parle à son père qui ne parle que suédois. Donc j’ai dû apprendre. C’était une bonne motivation».
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Erika parle de la différence entre l’Amérique du Nord et l’Europe: «Ça devient compliqué pour faire de la tournée. Déjà que les États-Unis ne sont pas faciles, mais maintenant c’est plus ardu aller en Europe puisqu’on doit partir pour plus d’un spectacle. On ne peut plus accepter de spectacles de dernières minutes dans un festival. On doit planifier. Mais c’est aussi très plaisant, car on est mieux organisé». Simon nous raconte comment c’était toujours difficile même dans le temps qu’il jouait pour Patrick Watson: «c’était facile pour lui, car il a un passeport américain, mais pour le reste du band, c’était une autre paire de manches».
J’ai demandé quel était l’apport du musicien montréalais sur la musique que Simon compose maintenant: «Le piano et la guitare jouent dans les mêmes fréquences et avec un gars comme Pat qui prend beaucoup de place. J’ai dû développer un son qui perce. J’ai aussi appris à flotter par-dessus la mélodie et la bonifier». Il avoue même avoir de la misère par moment à simplement jouer la guitare rythmique.
Ce fut un entretien des plus plaisants avec le couple Angell. Leur sincérité lors de notre rencontre se reflète dans leur musique… musique qui n’est pas pompeuse et qui possède une voix bien à eux. Le spectacle qui sera présenté dans le cadre de Montréal en Lumière est une chance unique d’entendre les pièces de Black Matter dans un enrobage dit de «grand déploiement». Ces chansons ont été composées pour être jouées en trio, mais elles prennent leur forme totale accompagnée des instruments à cordes. Si vous êtes déjà fan du groupe, c’est un événement à ne pas laisser passer.