Supergrass
I Should Coco
Il y a Blur. Il y a Oasis. Il y a Pulp. Et il y a aussi Supergrass, un groupe qu’on a souvent tendance à oublier lorsque l’on discute de britpop. Dans le cadre de la chronique Le Vieux Stock, on aimerait célébrer avec faste (et avec une mythique Rolling Rock) le 20e anniversaire du tout premier album de cette formation qui s’est éteinte en 2010 et qui était menée par l’excellent Gaz Coombes: I Should Coco.
Le contexte? En 1995, l’inutile bataille entre Blur et Oasis atteignait son paroxysme et alors que les Anglais (pour une fois) avaient une chance de s’unir derrière tout un courant musical, ils ont plutôt décidé de se déchirer entre eux, les riches snobinards préférant Blur et les pauvres, un peu « hooligans » sur les bords, choisissant l’arrogance des frangins Gallagher. Une véritable perte de temps!
Et la raison pour laquelle cet I Should Coco de Supergrass prend une certaine importance historique, c’est qu’avec l’aide de ces chansons juvéniles, évoquant autant le punk à cent à l’heure des Buzzcocks, le rock carré des Kinks et le pop-rock des Jam, et surtout, avec une insouciance totalement jouissive, les trois jeunes morveux de l’époque envoyaient paître joyeusement les mastodontes mentionnés précédemment. Enregistré très rapidement et réalisé par Sam Williams, ce disque respire l’urgence pas à peu près.
Au niveau littéraire, sans être un parolier de grand talent, Coombes prônait un relâchement des brides sur les adolescents britanniques de l’époque. Pas de problème avec ça, c’est ce qu’il faut faire quand on est jeunes, britannique ou pas! Caught By The Fuzz, par exemple, raconte l’histoire vécue par le leader du trio, se faisant arrêter à 15 ans pour possession de cannabis.
Chez Supergrass, il n’y a pas seulement que Gaz Coombes, on y retrouve également le bassiste cinglé Mickey Quinn et le frénétique batteur Danny Goffey. Les trois ensembles, principalement sur I Should Coco, refusaient obstinément le raffinement et lorsque l’on réécoute attentivement ce disque, on est happé par la folle énergie, peu subtile, mais complètement captivante de ces excellents musiciens.
I Should Coco s’est vendu à tout près de 500 000 exemplaires en Angleterre seulement et à près d’un million de copies à travers la planète… mais ça n’a jamais vraiment levé aux États-Unis. Rien de bien surprenant là-dedans. Les journalistes musicaux américains ont toujours boudé les parutions anglaises et le vice-versa s’applique autant aux Britanniques. Une imbécillité à notre humble avis!
À la sortie du disque, la critique européenne fut unanime saluant la fougue et le je-m’en-foutisme de Supergrass et force est d’admettre qu’avec le recul, I Should Coco vieillit super bien. Même l’humour enfantin présent sur l’album nous a fait sourire à quelques reprises. On vous conseille de prêter l’oreille à la locomotive punk I’d Like To Know, au piano très «Crocodile Rock» d’Elton John entendu sur Alright, à l’explosive Lose It, à la fuzzée Lenny, au blues rock très Lennon titré Time de même qu’à la beatlesque Sofa On My Lethargy. Notre morceau préféré? Strange Ones, avec ses changements rythmiques inattendus et sa petite inclinaison Buzzcocks, rock à fond la caisse. C’est totalement accrocheur!
Sans être un disque pour lequel on a un immense attachement sentimental, I Should Coco ne sera jamais relégué aux oubliettes ou encore rejeté de notre bibliothèque musicale, car c’est une conception sonore sur laquelle on aime revenir une fois de temps à autre afin de vérifier si elle tient encore la route. Pas de doute là-dessus, on vous le certifie, ça fonctionne encore très bien, et ce, 20 ans après sa sortie. Longue vie à I Should Coco et révérence à un groupe britannique fort mésestimé qui aurait sans doute mérité un peu plus de reconnaissance… du moins de ce côté-ci de la grande flaque!