Chroniques

Sold-Out Capitalisme : une entrevue avec Géraldine

10 ans. C’est l’anniversaire que fêtait cette année Sold-Out Capitalisme. Depuis, Géraldine nous a livré Baiser avec un miroir en 2011 et la chanson Tambours de guerre en 2014. Mais depuis, elle est tranquille musicalement parlant. À l’image de la série de balados, j’avais envie de poser la question : pourquoi Géraldine?

C’est tout sourire que Géraldine me répond sur le Web — pandémie oblige. Dix ans ont passé déjà depuis la sortie de Sold-Out Capitalisme, un album qui est plus né d’un contexte et d’une colocation que d’un plan pour conquérir le monde avec sa musique. On ne peut pas dissocier le projet de Géraldine de Navet Confit qui était à cette époque son coloc :

« Je ne faisais pas de musique à cette époque, mais j’habitais avec Navet Confit. On habitait dans un appart à 5 avec 3 Jean-Philippe, dont deux Jean-Philippe Tremblay. Navet avait un studio avec un tas de débris d’imprimantes. Pour le fun, un moment donné, on a fait Lance le sapin à Géraldine, qui était inspirée d’un jeu de Noël qu’on avait fait sur le party. C’est comme ça que j’ai commencé ma carrière musicale. À cette époque, on a lancé un MySpace et c’est devenu un hit. En plus, j’avais un ami qui travaillait au Laïka qui était libanais et qui a envoyé ça un ami dans une radio étudiante là-bas. Donc, Lance le sapin à Géraldine a commencé à jouer au Liban avant de jouer à Montréal! »

Ce premier coup fructueux a donné le goût à Géraldine de poursuivre l’expérience et composer d’autres pièces. Dans ce temps-là, ils faisaient des trucs pour le plaisir avec une certaine insouciance. Cette insouciance a porté ses fruits parce que les deux ou trois pièces suivantes ont joué à CISM et ont suffisamment fait parler de Géraldine pour que M pour Montréal et Sirius XM l’invite gratuitement à présenter une vitrine. Tout cela avant d’avoir un album. « Je n’étais pas prête pantoute pour ça. Il y avait des gens qui venaient me parler pendant que d’autres de l’industrie jouaient du coude pour parler à tous les big shots. C’était un bel accident tout ça. »

« À l’époque, je n’étais vraiment pas une musicienne. Si tu regardes des vidéos de nos premières performances, je regarde toujours Navet pour qu’il me donne mon cue. Aujourd’hui, je suis capable de faire des shows solos et de composer tout seul. Pour moi, c’est un grand accomplissement. Je suis très limité, mais ça donne son charme aux compositions, je pense. Je prends pas les mêmes chemins que les musiciens. »

Faire de la musique engagée sans faire exprès

« Je terminais un baccalauréat en animation et recherche culturelles à l’époque et c’est assez politique comme programme parce qu’on trouve des façons pour que la culture participe à la société et que la société le lui rende. À la fin de ça, j’étais brûlée. Je me posais beaucoup de questions. » C’est dans ce contexte qu’elle embarque dans l’aventure de Sold-Out Capitalisme. Il y a aussi la scène musicale qui est très différente : « J’ai l’impression qu’à l’époque, il y avait beaucoup plus souvent de deuxièmes degrés dans l’écriture et dans les projets. Et les lignes de démarcation des genres musicaux étaient vraiment plus marquées. Aujourd’hui, c’est plus perméable. »

À ce moment-là, le duo Géraldine et Navet Confit veut faire de la gaffer pop : « On prend de la pop, on la défait pis on utilise du gaffer tape pour essayer de la faire tenir ensemble quand on la remonte. » Il y a dans cette démarche une volonté de casser les moules et de les faire éclater. C’est peut-être cette recherche de liberté incontrôlable qui a mené à la création de chansons audacieuses qui nous donnent l’impression d’être très punks.

Une complicité au centre de la création

« Wow, t’es mon impresario! » C’est ainsi que Géraldine voyait Navet Confit à cette époque. L’ensemble des pièces ont été créées à deux. Parfois, Géraldine l’écoutait parler au téléphone, gribouillait quelques phrases et les donnaient à Navet Confit qui y voyait déjà une chanson. C’est cette amitié à la fois douce et solide qui se trouve au cœur de Sold-Out Capitalisme. On y reconnaît d’ailleurs l’audace musicale et le ton légèrement satirique de Jean-Philippe Fréchette.

« Pour la pièce Sold-Out Capitalisme, j’avais juste le refrain. On a fait de l’écriture automatique. Navet est parti dans sa chambre pendant deux heures. Je l’entendais rire, puis il ressortait avec une toune. » Le projet de Géraldine a toujours tourné autour des amitiés. C’est même Patrick Watson qui a fait la première partie de son lancement sous le nom de Pratique Watson. Il a même fait des reprises, dont Le Monde est stone et Killing in the Name of de Rage Against the Machine. En échange, Géraldine lui a fait un costume de dinosaure et un costume en jeans de lapin pour son ami. Le lancement avait lieu au deuxième étage du mythique Cléopatre.

Et le futur?

Géraldine travaille sur un triptyque musical qui devrait voir le jour dans un futur rapproché. Ça fait trois ans qu’elle teste les chansons sur scène qui devrait donner au moins un album. Elle y collabore avec Pascal Desjardins (Les Abdidagrationnistes), avec Patrick Watson et quelques autres collaborations.

Et la cagoule? Bien que les cagoules viennent des Georges Leningrad, Géraldine pense faire sauter la cagoule la prochaine fois. C’était drôle à l’époque, mais maintenant, il est temps de passer à autre chose. C’est très intéressant de voir l’évolution que prend le projet.

La sortie de Sold-Out Capitalisme est pleine de rebondissements et de bonnes histoires. Et le résultat reflète cette couleur et ces excentricités. Encore aujourd’hui, en entrevue, Géraldine est généreuse et rit beaucoup. Et c’est à l’image de ses créations qui sont vivantes et toujours teintées d’humour. À quoi peut-on s’attendre?

« La culture pour moi est un endroit brut de pureté. »

Ça promet.

Pour vous procurer l’album, c’est par ici:

Crédit photo: Facebook / Déplogue Quai des Brumes

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