Chroniques

Luggage

Shift

  • Corpse Flower Records
  • 2019

Parue à la fin du mois de novembre dernier, cette très lointaine époque où l’on pouvait déambuler calmement sur la rue sans être pris pour un violent criminel, la galette intitulée Shift du groupe américain Luggage est passée sous mon radar jusqu’à tout récemment. Par chance qu’un ami mélomane me l’a chaudement recommandé via un texto, car je serais passé à côté d’un sapré bon disque de rock crotté. Voilà un album qui devrait gifler les oreilles des brutes qui affectionnent les formations Shellac, The Skull Defekts, Metz ou Slint.

Durant huit chansons, pour un total de quarante-deux minutes, le trio de Chicago nous garroche des riffs angoissants, et même terrifiants, de post-punk et de noise-rock. Tout près de trois quarts d’heure durant lequel la charpente batterie-basse, constituée de Luca Cimarusti et Michael John Grant, est roi et maître, puis laisse très peu de place aux jolies mélodies.

Quant à lui, le chanteur-guitariste, Michael Vallera, qui se sert de sa guitare comme d’un couteau de cuisine japonais afin de nous charcuter les oreilles en pièces détachées, récite ses paroles plus qu’il nous les chante, et ça, ça ajoute un côté hostile aux chansons, tout en éliminant la possibilité d’y entendre une belle mélodie ou deux. Disons simplement qu’on est loin d’un chant gospel interprété par une chorale dynamique et talentueuse.

Sur Shift, les riffs sont souvent répétitifs et la moindre microvariation proposée nous donne l’impression de recevoir un petit coup de pied sournois sur le tibia. Comme pour nous ramener à l’ordre et nous forcer à les écouter plus attentivement. Les chansons ne sont ni joyeuses ni tristes, seulement chirurgicales, très froides et parfaitement exécutées.

Enregistré live dans le studio de Steve Albini (Shellac), chaque instrument est d’une grande clarté et nous fait croire que le groupe est confortablement installé dans notre salon. Bien franchement, c’est de l’excellente besogne de la part du réalisateur, Matthew Barnhart.

Troisième album au compteur pour la formation Luggage, et assurément leur plus abouti jusqu’à ce jour, Shift est anxiogène de la première à la dernière seconde. Et malgré sa froideur et son côté sans compromis, Shift est le genre de galette qui donne de fortes sueurs dans le fond de la tête et dans le dos. Et puis ça, en période de pandémie mondiale comme c’est le cas actuellement, ça peut rendre un brin aliéné.

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