La mafia des listes de lecture Spotify
Bill Noir est un rappeur émergent qui nous a envoyé une lettre ouverte. Nous avons décidé de la publier puisqu’elle traite d’un sujet qui a un effet sur de nombreux artistes indépendants et de la relève.
“You can’t record every three to four years and think that’s going to be enough. »
– Daniel Ek, CEO de Spotify
En tant qu’artiste émergent québécois, cette affirmation incisive de Daniel Ek, CEO de Spotify me laisse franchement sur ma faim. Après plus de 30 parutions musicales en 2019 et un compte en banque de gratteux de guitare, l’envie me prend, pour la première fois, de m’exprimer ailleurs que dans mes chansons. Plusieurs artistes se sont déjà prononcés quant aux maigres redevances que Spotify leur offrait. Dans un effort constant d’être original, j’ai d’autres reproches envers la compagnie du milliardaire Daniel Ek.
Vers la fin de 2019, j’ai cru comprendre que le curateur ou la curatrice des principales listes de lecture francophones québécoises aurait quitté son poste, on ne nommera pas son nom, mais disons qu’il ou elle faisait bien les choses. Merci pour ton bon travail! Pour ma part, plus de 15 chansons en playlists; ce qui se traduit en une fierté à pousser Spotify comme médium d’écoute à mes auditeurs.
Fast-forward à 2020, la composition de ces fameuses playlists a drastiquement changé: on voit d’abord que les artistes indépendants sont maintenant sous-représentés dans ces listes de lectures visiblement dominées par des artistes endisqués. Est-ce que Spotify oeuvre désormais au service des maisons de disques? Est-ce que Spotify ignorera encore longtemps des acteurs incontournables du paysage rap québécois tels que Jeune Loup ou Rowjay? Pour l’instant, la réponse semble être oui.
Est-ce que ce sont des artistes français que j’entends dans les playlists « Nouveautés De La Semaine Canada » ou sur ladite liste de lecture « Rap Québ »? Oui, mais ce n’est pas pour envoyer du shade à nos cousins européens que j’en fais la mention. Cependant, est-ce qu’on manque de talent au Québec au point où on doit aller chercher le talent ailleurs? Non. Est-ce qu’on peut blâmer un changement de personnel pour ce manque de vision? Peut-être que oui, mais une chose est sûre, en 2020, Spotify ne sait pas représenter la culture et ne comprend pas ce qu’est la modernité !
Bill Noir est un rappeur qui affectionne particulièrement la trap. Il est actif depuis quelques années, mais a fait une percée en janvier 2019 avec la pièce Project Moon Dust.
Il nous a contacté suite à notre texte sur les paroles qui ont été mal reçues du milieu musical dans les dernières semaines. Nous avons décidé de lui laisser la parole en espérant que cela ferait mieux comprendre certains enjeux de l’écoute de musique en ligne.