Entrevue | Nova Musique : avec Ariane Moffatt et Sarahmée, promouvoir la persévérance scolaire par l’accessibilité à la création musicale
C’est dans le cadre d’une conférence tenue à l’Hôtel le Saint-Sulpice que, suite à notre plus récent article sur Déclic par la musique, cette nouvelle initiative de Nova Musique qui promeut la persévérance scolaire par l’accessibilité à la création musicale, nous avons décidé d’aller à la rencontre de deux de ses ambassadrices : Ariane Moffatt et Sarahmée.
Peu de temps après la conférence orchestrée par le directeur général de Nova Musique Jocelyn Ménard, j’ai eu la chance de poser quelques questions aux musiciennes Ariane Moffatt et Sarahmée notamment au sujet de leur motivation à s’investir dans le projet, ce qu’elles croient être en mesure d’apporter, comment elles voient ce projet évoluer et l’impact positif de la démocratisation, voire de l’accessibilité à divers outils technologiques servant à confectionner de la musique.
Novassadrices : un no brainer
La première question adressée aux deux novassadrices Ariane Moffatt et Sarahmée avait pour but d’en savoir davantage sur ce qui les avait poussées à accepter de se mouvoir dans cette initiative. Après un roche papier ciseau pour répondre, Sarahmée a commencé avec ceci :
« Quand j’entends musique et jeûne, c’est presqu’un « no-brainer ». Quand tu as accès à de la musique jeûne, quand tu as des possibilités de pouvoir t’exprimer, de créer, de découvrir un monde, comme dans le sport ou autre chose, tu rentres dedans et là, ça peut devenir une passion. Moi, je sais que quand j’étais jeune, j’écoutais énormément de musique. J’écoutais des freestyles, du rap ; l’oreille sur le speaker, j’enregistrais des émissions de radio, puis je reculais, puis je réécoutais les freestyles, puis là, j’apprenais ce qui est devenu ma passion et un art. Mais à l’école, j’ai eu des profs aussi qui m’ont remarqué et des gens qui m’ont dit » Hey, ça, tu peux le faire, tu peux faire de la musique, tu peux continuer, écris, écris « . Moi, c’était beaucoup plus l’écriture que la production musicale. Puis après, c’est venu avec ça. Mais tu sais, trouver une passion ou se découvrir une passion, ça n’arrive pas du jour au lendemain. Puis des fois, il faut juste essayer quelque chose sans savoir où ça va mener. La musique, c’est autant un baume pour la vie, pour le cœur, c’est autant un moyen d’exprimer, c’est plein de choses. La musique fait partie, en tout cas, de nos vies de multiples façons. Et c’est précieux d’en donner accès aux jeunes qui n’ont pas forcément l’opportunité d’avoir ça ou qui ne sont peut-être pas intéressés beaucoup par l’école, qui ont besoin de motivation, etc. Quand tu es passionné par quelque chose à l’adolescence, ça te drive pendant un bon moment. »
En approfondissant sur le sujet, Ariane Moffatt a quant à elle profité du moment pour mentionner que si le gouvernement et les écoles, voire les institutions d’apprentissage et de développement, ne cherchent pas à offrir davantage de cours et de programmes de musique accessibles, une OBNL telle que Nova Musique peut très bien avoir cet impact positif et engagé :
« C’est inégal entre les écoles. Plusieurs d’entre elles ont de la misère à avoir de la musique. Si c’est à travers un projet plus privé OBNL que ça va se passer, on va la faire la job. Socialement, que les arts à l’école soient aussi peu valorisés, c’est inacceptable. Suite à mon implication légère dans le milieu de l’éducation et de la musique à l’école avec les Journées culturelles pour tous, je me suis demandé : » Qu’est-ce qui est à ma portée pour qu’on puisse dépoussiérer la pédagogie ? » Parce qu’à travers ces projets-là, il va également y avoir l’apprentissage théorique de la musique. Ce sera, oui, l’exploration de Ableton Live, mais ça va être la valorisation de la chanson. Les chansons francophones aussi, la pérennité de notre création d’ici. C’est ça. C’est de ramifier tous ces éléments-là afin que dans l’éducation des jeunes, les arts soient là, la création soit là. Parce qu’on dirait que si on ne fait rien, ça va juste disparaître. »
Impact de l’intégration technologique
Après avoir échangé avec Ariane Moffatt et Sarahmée sur le fait que la musique est un langage universel et un outil social, un élément qui est à la fois rassembleur et intime, un partage et un enrichissement de soi dans la création et la collaboration, j’étais curieux d’avoir leur point de vue sur l’intégration de la technologie dans les milieux d’apprentissage. Ce qu’on retient, ce sont les nuances que les deux musiciennes ont soulevé, arrivant toutes deux à la conclusion que la technologie et la création ont un impact positif et que leur place devrait être solidifiée et encouragée dès un jeune âge.
D’abord, Sarahmée a répondu : « Moi, je suis totalement pour. Je ne suis pas pour aucun dogme ; de dire, OK, là, c’est juste des ordinateurs, puis ce n’est plus de piano, puis ce n’est plus de guitare. Non, c’est tout ça. Mais si un jeune, quand il fait ses beats, dit, » Moi, je veux être sur la même machine que mon rappeur préféré « , ça donne une source de stimulation d’être dans quelque chose d’actuel. Parce que c’est là qu’on est. Puis la pédagogie peut tellement mieux passer de même. C’est ça le but de Nova Musique, c’est de faire des applications où tu apprends la théorie musicale, mais à travers ces outils-là. » La musicienne a plus tard renchérit sur le fait qu’en majorité du temps, une part du processus nécessite forcément la technologie, notamment pour le mixage et le matriçage.
Sur le même sujet, Ariane Moffatt mentionne : « Ça n’enlève pas la possibilité que la souche, ça part de notre âme, de notre vision du monde, de la poésie, de l’imaginaire. Quand je parle de musique avec mon fils, je l’amène au studio, on prend une toune de Sia, on isole la voix puis on fait un remix par-dessus. C’est de même que je lui apprends la musique, en étant avec lui dans l’exploration. Aujourd’hui, comme depuis toujours, ça me touche, parce que moi j’ai commencé avec mon synthétiseur Korg et des disquettes, puis je séquençais là-dedans. 25, 30 ans plus tard, c’est la même chose, c’est juste avec les outils d’aujourd’hui. Peu importe le moyen, si on a un lieu commun ancré dans le présent avec nos enfants ou les jeunes, l’échange va se faire, puis la magie va opérer. ».
Un peu plus tard dans cet entretien, la question financière en lien avec l’accessibilité à la musique a été avancée par Sarahmée : « Ce n’est pas tout le monde qui peut s’acheter des guitares, des basses, des synthés. Mais un petit clavier midi et un laptop, c’est plus accessible. Moi, mes amis, ils ont tous commencé à 15-16 ans comme ça. Je pense qu’il faut qu’on donne le choix, pour que les jeunes puissent s’exprimer, créer. C’est aussi d’amener la curiosité à ouvrir plus de portes sans restrictions ».
Et pour la suite des choses
Sans chercher à prédire l’avenir ou à se projeter dans une décennie, j’ai demandé ce qui pourrait s’apparenter au plus grand souhait que l’on pourrait avoir concernant la suite de ce projet ainsi que de la présence de la musique, de la culture et de la technologie dans les milieux d’apprentissage. La réponse qu’a donné Ariane Moffatt semble résumé le tout : « J’aimerais que ça devienne dans toutes les écoles, que ça devienne un peu englobé dans les centres de jeunesse, le système d’éducation au Québec. Carrément. Des cours de musique à l’école, que ce soit comme normalisé, puis que dans tous les lieux, les centres d’intervention jeunesse ou centres de jeunesse, que tous les enfants qui sont favorisés comme défavorisés aient la même possibilité, le même accès. C’est fondamental. Ça m’a marquée quand je suis arrivée dans les écoles. Au privé, il y avait de l’organisation. Au public, à peine un petit tambour, une petite flûte. Il faut qu’il y ait de l’égalité dans l’accès à la culture au Québec ».
En terminant, pour en savoir plus sur l’initiative, vous pouvez consulter ce lien. Et pour contribuer au financement du Déclic par la musique, le tout soutenu par La Ruche, c’est par ici que ça se passe.
Un gros merci à Ariane Moffatt et Sarahmée pour leur précieux temps et pour leur implication!