Chroniques

Akousma 2024 | Entrevue avec Louis Dufort : fêter l’unicité du festival dans le paysage musical

Célébrant ses 20 ans cette année, Akousma propose une fois de plus une programmation relevée qui allie des talents locaux à de grands noms venus de l’international. Pour parler de cette célébration des œuvres composées pour l’écoute en communion avec le spectateur, je me suis entretenu avec Louis Dufort, artiste et directeur artistique du festival.

Du 16 au 18 octobre, Akousma sera de retour à l’Usine C pour trois jours qui célèbrent la musique acousmatique, les musiques concrètes et tout ce qui tombe sur le grand parapluie de la musique électronique immersive. À Akousma, c’est d’abord et avant tout les oreilles qui sont sollicitées. C’est d’ailleurs une des choses qui attirent les artistes d’ailleurs au festival. Louis Dufort explique que : « nous, c’est là-dessus qu’on focus : c’est-à-dire une musique de concert, une musique qui s’écoute souvent dans le noir, dans la pénombre, où il n’y a pas nécessairement de performance. Ça, c’est une autre chose qui fait tripper les artistes, parce que des fois, ils font du live juste pour vendre leur salade. Parce que c’est la manière de faire et ils jouent dans des contextes où il y a un bar, il peut y avoir un bar dans la salle ou tout ça, donc c’est plus bruyant. Mais là, vraiment, c’est la grosse Cadillac. Ils arrivent, il y a 50 haut-parleurs et le public est super à l’écoute. Donc, c’est vraiment de la musique de concert, de la musique écrite pour un concert qu’on présente. »

Cet amour de la musique enregistrée et des possibilités nombreuses que proposent les différentes formes de musique électronique aujourd’hui est au centre de ce qui fait d’Akousma une communauté vivante. Et cette communauté, elle est formée d’un public qui change avec le temps.

Un public en pleine métamorphose

On le sait peut-être peu, mais Montréal est une plaque tournante de la musique acousmatique en Amérique du Nord. Tout d’abord, Akousma est le seul festival de la sorte du continent. De plus, il y a 4 universités ou programmes qui se spécialisent dans le genre : le Conservatoire de musique du Québec à Montréal, l’Université de Montréal, l’UQAM et l’Université Concordia. Les étudiants de ces programmes sont évidemment interpellés par Akousma. C’est une jeunesse éduquée qui se retrouve dans les salles du festival : « une jeunesse qui arrive et qui, elle, elle connaît ça de la musique acousmatique. Elle connaît les références historiques, parce qu’il y a eu une espèce de boom de musique concrète. Il y a beaucoup d’artistes de musique électronique qui se sont intéressés à la musique expérimentale, soit via le techno et le IDM avec Aphex Twin, Autechre , puis tout ça. Puis on a eu la deuxième vague avec toute la vague PC Music, tout le Vapor Wave, Oneohtrix Point Never et toute cette gang-là. Beaucoup de jeunes, des bedroom artists, qu’on peut appeler aussi, qui trippent sur les nouvelles technologies, puis qui font de la musique dans Live, entre autres,qui est un logiciel aussi qui permet de travailler de façon expérimentale de manière assez accessible. Les jeunes j’ai l’impression qu’ils ont fait leurs devoirs et ils connaissent Iannis Xenakis, ils connaissent Pierre Schaffer et ils connaissent Stockhausen. »

Louis Dufort explique aussi que depuis quelques années, il fait de grands efforts aussi pour faire tomber la barrière de la langue : « ça fait des années que je travaille aussi à attirer davantage un public anglophone parce qu’on a encore les deux solitudes au Québec, surtout dans la musique pop et expérimentale. C’est deux scènes pas très poreuses entre les deux. Je me suis appliqué à inviter des artistes locaux anglophones. Puis là, tranquillement, je trouve qu’il commence à avoir vraiment une belle synergie entre les deux communautés. L’an passé et à Akousma 18, j’ai vraiment senti dans le public qu’il y avait un changement. »

Une édition 2024 relevée

Quand on aborde la nouvelle édition du festival, on voit rapidement le feu s’allumer dans les yeux de Louis Dufort et les mots commencent à couler. Soucieux de donner un éclairage adéquat à chacun des artistes de la programmation, il plonge dans ce qui les rend uniques et intéressants. Parmi ceux-ci, on retrouve quelques curiosités comme Estelle Schorpp qui construit ses pièces avec des disques du 19e siècle consacrés aux chants des oiseaux joués sur gramophone. Dire que c’est une approche unique à la composition musicale est un euphémisme. D’ailleurs, Louis Dufort ajoute que : « cette année, c’est encore plus frappant dans la programmation. Il y a un intérêt marqué chez les compositeurs et compositrices pour les soundscapes, c’est-à-dire les paysages sonores, l’intégration de sons de la nature à l’intérieur des œuvres. »

Le directeur artistique du festival s’est aussi fait plaisir à lui-même, et au public par la bande bien sûr, en invitant Horacio Vaggione : « c’est un peu un héros personnel pour moi. C’est vraiment un mentor. On est devant l’un des pionniers de la musique électroacoustique mondial, sud-américain, argentin en fait, mais qui a enseigné longtemps à Paris 8. » Louis Dufort ajoute que vu son âge vénérable, il se peut que ce soit le dernier passage de Vaggione à Montréal. Une occasion à ne pas manquer.

Il y a aussi des talents locaux qui seront célébrés pendant Akousma 20 avec notamment Julien Racine que Louis Dufort essaie d’avoir au festival depuis quelques années : « Julien, ça fait longtemps que j’essaie de l’inviter. Puis, il me propose toujours des trucs collectifs. Encore là, il m’avait proposé de faire un truc collectif. J’ai dit : non! Là, Julien, c’est toi que je veux. Puis, il va faire une pièce spécialement pour le festival. Donc, on est vraiment très choyés. »

On pourrait passer ainsi l’ensemble de la programmation du festival, car Louis Dufort est fier de sa programmation et ça parait. Sa passion pour la musique acousmatique et pour les formes expérimentales de musique électronique est contagieuse. D’ailleurs, vous aurez aussi la piqûre si vous participez à Akousma 20 qui se tiendra du 16 au 18 octobre prochain à l’Usine C.

Vous pouvez vous renseigner sur la programmation complète ou acheter vos billets via le site officiel du festival.

*Cet article a été rédigé en collaboration avec le festival Akousma.

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