Mutek 2017 : retour sur la soirée du 24 août
Ma troisième soirée débutait avec la performance très attendue de AVisions 1, la série audiovisuelle du festival, suivi par une fresque de musiques drone avec Nocturne 3 au Métropolis, et une petite escale à la SAT dans le cadre de Inter_Connect México.
L’artiste berlinois Robert Henke (Monolake, Helical Scan) traverse l’océan atlantique moins souvent depuis qu’un certain gouvernement états-unien est en place. Sa présence à Montréal jeudi soir était donc une occasion relativement rare de savourer son travail. Cette chance était décuplée par le fait qu’il venait présenter Lumière III, troisième œuvre audiovisuelle s’apparentant à de la vidéomusique, mais dont la partie visuelle est générée par trois projecteurs laser. La musique techno était structurée en segments parfois lents et atmosphériques, parfois denses et industriels. Le visuel oscillait entre lignes et formes géométriques aux palettes composées de couleurs saturées.
Un peu plus tard ce soir-là, France Jobin (alias i8u) présentait Vacuum phase transition : an exploration of metastability à Nocturne 3, avec un vrombissement sourd dans les basses fréquences qui prenait de l’altitude de façon très progressive. Je ne me rappelle pas de la dernière fois que j’ai écouté une performance assis en indien au parterre du Métropolis, mais ça allait de soi dans ce cas-ci puisque l’écoute profonde était de mise. L’expérience physique était d’ordre méditatif, et donnait envie de participer à l’épaisse trame sonore avec une certaine syllabe sanskrite.
L’albertaine Sarah Davachi donnait suite avec une trame légèrement plus haute en fréquences et plus aérienne, comme un mirage sonore réverbéré au loin. On pouvait déceler des retailles de mélodies au sitar, dispersées à travers la masse plutôt dense de consonances et de dissonances montées en fondus enchaînés. Comme en première partie, la performance permettait également de quitter le lieu de diffusion pour un espace vaste, appelant à l’abandon de soi.
Anthony Child (British Murder Boys, TRADE), alias DJ Surgeon, assurait la troisième partie sous le thème de la musique drone, avec des enregistrements rappelant les îles tropicales et des sons de synthétiseur modulaire déployés de façon parfois composée, parfois improvisée. Les variations étaient plus facilement perceptibles dans ce cas-ci, offrant une occasion de reprendre son souffle après deux séances en apnée.
Fis, alias le néo-zélandais Olivier Peryman a monté l’intensité d’un cran (ou plusieurs, selon l’auditeur) en croisant une trame drone avec des rythmes chaotiques et du synthwave qui flirtait pas mal avec du noise. L’atmosphère était tout aussi envoûtante, mais avec un sens du phrasé et de la ponctuation qui mettait fin aux vibrations méditatives.
Le projet Deathsitedemo.ca du norvégien Helge Sten (Supersilent) concluait la soirée avec du noise et de l’ambient épurés, imprégnés d’une froideur nordique typique des régions scandinaves. La ligne directrice, comme un filament de glace, était ponctuée d’événements sonores subits, comme un glacier exprimant chaque étape de sa destruction.
J’aurais aimé revenir sur la performance de Cecilia aka BABI AUDI (alias Mélissa Gagné) dans le cadre d’Inter_Connect México mais le changement à l’horaire a fait en sorte que je me suis retrouvé dans le DJ set de la mexicaine OLY, alias Dulce Masse (Chase The Devil). Remarquez, du grime/trap/bass faisant vibrer tous les boulons et écrous de la SAT créait un contraste parfait à la soirée drone au Métropolis.