Matthew E. White
Fresh Blood
- Domino Records
- 2015
- 47 minutes
Le compositeur, réalisateur, arrangeur et fondateur de la maison de disques Spacebomb Records, Matthew E. White, fait paraître cette semaine son deuxième album en mode solo intitulé Fresh Blood. En 2012, White avait présenté Big Inner; disque fort bien reçu par la critique. Fait à noter, pour chacun des artistes signés sur son label, White rend totalement disponible la formation maison afin d’accompagner ces nouveaux créateurs chansonniers dans leur processus d’enregistrement. C’est ce qui a été accompli sur l’homonyme de Natalie Prass paru récemment.
Chez White, on est plongé dans un alliage de soft-rock, de jazz, de southern-rock feutré, de soul millésimé (un peu Motown) amalgamés à des orchestrations minutieuses de cordes et de cuivres. Avec surprise, le multi-instrumentiste fait preuve d’une certaine retenue en évitant la grandiloquence sirupeuse à la Disney… ce qui nous avait quelque peu déplu sur l’album de Natalie Prass. Normalement, ce genre musical nous laisse de marbre, mais cette fois-ci, le talent de White vient outrepasser tout ce qui pourrait nous agacer.
On assiste à une performance hors pair des accompagnateurs de White et celui-ci auréole ses chansons d’inflexions vocales posées, quasi chuchotées. Certes, les arrangements sont luxuriants, mais l’approche vocale de White (simple et ponctuée de délicieux vers d’oreilles) vient calmer le jeu et amenuiser la boursouflure musicale anticipée. Ce qui démarque cette parution de ses semblables, c’est ce superbe talent de réalisateur/arrangeur de White et ça s’entend particulièrement sur ce chef-d’œuvre que représente Holy Moly; morceau de bravoure extatique portant sur les abus sexuels de «nos» religieux en situation d’autorité… Cordes, cuivres, gospel, section rythmique béton, crescendo frémissant, Holy Moly est tout simplement une très grande chanson qui porte pratiquement ombrage aux autres pistes de ce Fresh Blood. Impossible de demeurer de marbre devant autant de véridicité et de puissance.
De plus, White y va d’un hommage senti au grand acteur américain, décédé l’an dernier, Philip Seymour Hoffman (un favori de votre vieux scribe): une splendide balade un peu champ gauche titré Tranquility. White n’était pas nécessairement un proche d’Hoffman, mais l’homme était l’une des plus grandes inspirations du musicien, surtout en ce qui a trait aux choix artistiques créatifs et intègres que l’acteur a su faire tout au long de sa courte, mais fructueuse carrière. Corrélativement, le talentueux interprète nous gratifie d’un élémentaire Rock ‘N Roll Is Cold; un «twelve bar blues» basique, presque niais, mais qui, exécuté par le groupe de White, sonne tout à fait juste.
En plus des pièces évoquées précédemment, Matthew E. White présente quelques autres moments musicaux de qualité. On pense au rock sudiste/gospel/cuivré Feeling Good Is Good Enough, le soft-rock gospelisant/enjoué Vision ainsi que la conclusive remplie d’espoir Love Is Deep.
Bien honnêtement, ce début d’année est probablement le meilleur (en ce qui nous concerne) depuis la naissance du Canal Auditif. Une panoplie de conceptions sonores se sont vues octroyer des notes assez élevées. Ce Fresh Blood vient aisément se joindre à ce groupe de parutions prisées. On peut bouder le penchant un peu passéiste de ce disque, mais la qualité de la réalisation, la dextérité des musiciens et le songwriting efficient de White viennent largement compenser ce minuscule impair.
Ma note: 7/10
Matthew E. White
Fresh Blood
Domino Records
47 minutes
http://dominorecordco.com/freshblood/?link=freshblood
[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=co4krl2xge0[/youtube]