Critiques

Ty Segall

Freedom’s Goblin

  • Drag City
  • 2018
  • 74 minutes
8
Le meilleur de lca

Bon an mal an, Ty Segall nous gratifie d’un nouvel album. Et 2018 ne fait pas exception à la règle. À pareille date l’an dernier, le nouveau trentenaire faisait paraître un excellent album homonyme, enregistré sous la férule de Steve Albini, sur lequel il faisait étalage de tout son talent. Cette année, Segall revient à la charge avec Freedom’s Goblin… et les habitués de la maison pourraient être quelque peu désarçonnés par la démarche artistique du musicien.

Le bonhomme nous garroche un total de 19 chansons en 75 minutes, constituant ainsi un superbe survol de l’histoire du rock états-unien. Folk rock, Americana, jazz rock, R&B, punk, stoner, alouette ! Segall se gâte, pas à peu près. Enregistré dans cinq studios différents, entre Los Angeles, Chicago et Memphis, Segall, en plus de mettre de l’avant ses propres aptitudes à réaliser ses chansons, a fait appel à quelques  « hommes de main » pour effectuer le travail : Steve Albini, Facundo Bermudez (No Age, Mika Miko) ainsi que l’un des maîtres du R&B  « vintage », Lawrence Mitchell (Al Green, Solomon Burke, Rod Stewart, etc.).

Tout en ratissant prudemment de nouvelles avenues musicales, enrichissant son pop-rock (oui, c’est bel et bien un album de pop-rock auquel on a droit) de salves de saxophones, de Fender Rhodes, de grooves entraînants, de country rock, et j’en passe, l’hyperactif créateur nous propose des mélodies imparables qui demeurent scotchées dans nos masses cérébrales. Au risque de déplaire à ceux qui le préfèrent en mode lourd et  « fuzzé », Segall peaufine ses capacités mélodiques en personnalisant sa voix et en s’éloignant de l’influence manifeste de Marc Bolan (T. Rex). Bref, le virtuose fait un pas de plus vers la reconnaissance du plus grand nombre, et ce, sans perdre sa crédibilité.

Segall ne se réinvente pas et ne métamorphose absolument rien, mais il fait la preuve que l’on peut créer un excellent album de pop-rock, pertinent et rassembleur à la fois. Freedom’s Goblin regorge de petites pépites rock qui valent la peine d’y revenir inlassablement. La reprise chambranlante d’Every 1’s A Winner, succès de la formation anglaise Hot Chocolate, est réussie. Le folk rock, très Blood On The Tracks de Dylan, intitulé My Lady’s On Fire, émeut. Rain a des airs de Pyramid Song de Radiohead. You Say All Nice Things est un folk rock psychédélique comme seul Segall peut en créer. Talkin 3 aurait pu facilement paraître sur l’album Fun House des Stooges. 5 Ft Tall est du Nirvana pur jus. Alta symbolise la rencontre improbable entre Kurt Cobain et Guns N’ Roses. Et la pièce de résistance de ce nouveau disque est sans contredit le coup de massue « stoner rock » que représente She. En concert, ça rendra fou les fans de Segall ! Ce périple se termine avec une version, à la Neil Young & Crazy Horse, de Sleeper (chanson parue sur l’album du même nom paru en 2013), rebaptisée pour l’occasion And Goodnight.

Même si le bon Ty ne nous surprend guère (résultat d’une production discographique effrénée), le mélodiste, lui, prend de l’assurance. C’est cette force mélodique qui fait de Freedom’s Goblin un album sur lequel on a envie de revenir inlassablement. En compagnie de John Dwyer (Thee Oh Sees) et Stu Mackenzie (King Gizzard and the Lizard Wizard), Ty Segall complète à merveille cette nouvelle trinité du rock contemporain.

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