Critiques

Laura Marling

Semper Femina

  • Indépendant
  • 2017
  • 42 minutes
7,5

La Britannique Laura Marling a une vieille âme. La tonalité de sa voix, la qualité de ses textes, son folk rock référentiel, tout son art vibre comme celui d’une artiste d’âge mûr. Et pourtant, elle n’est âgée que de 26 ans. Et c’est ce qui impressionne le plus chez elle : cette jeunesse qui s’imbrique parfaitement à une indéniable maturité artistique.

J’ai connu Marling grâce au sublime Once I Was An Eagle; disque évoquant autant le jeu de guitare de Jimmy Page (Led Zeppelin) que les ambiances feutrées de Joni Mitchell. En 2015, l’auteure-compositrice-interprète délaissait les sonorités acoustiques pour emprunter un chemin plus rock. Short Movie, enregistré à Los Angeles, portait clairement les stigmates de PJ Harvey. Une autre réussite au compteur déjà garni de Marling.

La semaine dernière paraissait Semper Femina. Réalisé par Blake Mills (Conor Oberst, Weezer, Cass McCombs, etc.), ce nouvel album de Marling marque un retour aux sources qui est en parfaite concordance avec le fait que le disque ait été colligé à Londres. L’Anglaise replonge dans son folk habituel tout en conservant l’aura rock du précédent effort. Une création équilibrée, posée et probablement l’un de ses meilleurs disques, si ce n’est pas son plus achevé.

Pour vous situer, ce Semper Femina alterne entre un folk rock « dylanesque », très années 70, et des chansons mettant en lumière l’efficace « fingerpicking » de cette compétente technicienne. Les subtils arrangements de violons pullulent sans tomber dans une ostentation disgracieuse. On y entend même des ascendants orchestraux évoquant autant Nick Drake que la magnifique Nico; chanteuse mythique du Velvet Underground.

La voix paisible de Marling est donc postée à l’avant-plan dans le mix, sans que ce soit désagréable comme chez certaines sitedemo.cauctions québécoises datées. Honnêtement, c’est probablement l’un des plus beaux mix qu’il m’ait été donné d’entendre depuis que je rédige des textes pour le compte du Canal Auditif. Combiné aux quelques guitares électriques saupoudrées, çà et là, et à un jeu de basse bluesy, cette nouvelle création est un impératif pour tout amateur de folk qui se respecte.

Toutes ces instrumentations organiques imposent une solennité aux chansons de Marling. Ça pourrait même paraître glacial aux oreilles de certains mélomanes, mais au fil des écoutes, de nombreux trésors sonores font délicatement leur apparition. Il se dégage de cet album une sensualité qui déstabilise et séduit en même temps.

Si vous y mettez le temps, vous apprécierez d’un bout à l’autre ce Semper Femina. Parmi mes moments préférés? L’intervention des cordes frémissantes au beau milieu de Soothing, la très Nick Drake titrée The Valley, la mélancolique Don’t Pass Me By, les dépouillés Wild Once et Nouel ainsi que la valse folk rock Nothing Not Nearly.

Laura Marling épure son art, va à l’essentiel et prend de plus en plus d’assurance. Normalement, à cet âge, et après autant d’albums, on devrait assister à un déficit créatif. C’est tout le contraire qui se passe. D’ici quelques années, elle sera probablement considérée comme un monument de la musique folk britannique. Un disque ravissant.

Ma note: 7,5/10

Laura Marling
Semper Femina
Indépendant
42 minutes

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