Critiques

Saafron

Saafron- Reishi

  • Leaving Records / Stones Throw
  • 2016
  • 33 minutes
7,5

SaafronLe Reishi est un champignon rare très prisé par la médecine chinoise et japonaise. Depuis plus de 2000 ans, on prétend qu’il peut rallonger l’espérance de vie. Dans 200 ans, je vous ferai signe si l’écoute de Reishi, premier album du beatmaker de Detroit, Saafron, m’a donné la vie éternelle. En attendant l’immortalité, il faut mentionner que la boîte californienne légendaire Stones Throw Records (J Dilla, Madlib, Quasimoto, Dam-Funk, etc.) est affiliée à Leaving Records pour le lancement de ce fongus musical. L’implication d’une maison de disque d’une aussi grande renommée m’a mis la puce à l’oreille, j’espérais écouter un album instrumental de beats champ gauche d’une vedette montante.

Dès la première pièce, Saffron, on comprend pourquoi l’équipe de Stones Throw s’intéresse au nouveau venu. Des influences marquées de claviers et percussions déconstruites du prophète Dilla. Pour un équivalent québécois, ça fait penser aux mixtapes aux couleurs de Kenlo Craqnuques ou des beats que faisait Kaytranada du temps qu’il s’appelait encore Kaytradamus. On est accroché dès les premiers instants. Notre tête oscille et le bassin suit sans difficulté. L’échantillonnage de voix est manipulé comme une percussion, jusqu’à en devenir hypnotique à souhait. Pour ceux qui préfèrent le lourd tout en gardant l’effet accrocheur, Destructo Disc et Special Beam sont toutes indiquées.

L’atmosphère change avec Chiyo où les basses profondes, les claviers brumeux et les high hats nous propulsent dans les hautes sphères du trap. Saafron délaisse les structures traditionnelles du hip-hop pour donner de plus en plus de place à l’électronique. Host Body rappelle d’ailleurs l’excellent Ghettoville d’Actress où les différentes textures sonores créent un univers lugubre. Personnellement, Saafron m’a aidé à me réconcilier avec le trap en proposant autre chose que la même ligne de basse qu’on entend depuis 2 ans.

Mtulazaji-Spirit Bomb est sûrement un des moments d’inspiration house les plus marquants de l’album. Les clochettes donnent un effet stroboscopique avec leurs différents niveaux d’intensité. Presque aussi réussi que certaines pièces du Beautiful Rewind de Four Tet.

Attendez-vous donc à la contemplation de paysages sonores répétitifs, mais parsemés de détails détonants. Les petites imperfections préméditées ou les moments d’improvisation fragmentent la structure répétitive des tracks pour former une mosaïque de «micro-loops» qui se complexifie au courant de chaque pièce. Un exemple parfait qu’un bon beat n’a définitivement pas toujours besoin de rappeurs.

Ma note: 7,5/10

Saafron
Reishi
Leaving Records/Stones Throw Records
33 minutes

https://leavingrecords.bandcamp.com/album/reishi