Chroniques

Lords of Acid

Lust

Lords Of AcidUne liste d’écoute qui se respecte contient toujours un plaisir coupable caché discrètement entre les nouveautés et les classiques, libéré de l’underground pour revenir hanter le casque d’écoute. Il y en a un en particulier qui est réapparu sur ma liste dernièrement après avoir réalisé que c’était son vingt-cinquième anniversaire. Je vous rassure, ce n’est pas un album qui a flotté au sommet des ventes, mais qui a plutôt nécessité une pelle et une visite au cimetière acid house pour le déterrer. Dans le cadre de la chronique Le Vieux Stock, je vous présente Lust (1991), premier album du groupe belge Lords Of Acid.

L’histoire commence deux ans plus tard lorsque j’entends une de leurs pièces pour la première fois en regardant le film Sliver (1993), un navet cinématographique qui tentait de capitaliser sur le momentum « thriller érotique » laissé par Basic Instinct l’année précédente (avec la même actrice principale curieusement). La trame sonore valait heureusement plus d’une écoute avec sa sélection de pièces à faire jouer à volume élevé, dont Carly’s Song d’Enigma, Unfinished Sympathy de Massive Attack (sur l’historique Blue Lines), et The Most Wonderful Girl des Lords Of Acid.

La pièce commence sur un synth acid et Jade 4U qui s’exclame « I’m fucking beautiful, I’m the greatest thing I’ve ever seen, god I love myself ». Le rythme embarque et on se retrouve dans un party rave, avec mille autres personnes sur l’ecstasy. Le refrain semble tout droit sorti d’un film érotique de série B, dont la sexualité débridée créer un méchant contraste avec le ton romantique de la trame sonore. L’ado en moi était impressionné par la combinaison acid house hardcore, un sous-genre bien plus dense que le new beat belge découvert quelques années plus tôt. Internet n’était pas encore commercialisé à ce moment-là, et même Sam The Record Man n’avait peu ou pas de copies des Lords Of Acid. Ce n’est que trois ans plus tard que j’ai redécouvert LoA lors d’une soirée industrielle avec leur classique I Sit On Acid.

Fondé officiellement en 1988 par Maurice Engelen (Praga Khan), Oliver Adams et Nikkie Van Lierop (Jade 4U), LoA a pris d’assaut les pistes de danse avec leur premier simple intitulé I Sit on Acid. Pendant que Pump Up The Volume (MARRS, 1987) et Theme From S’Express (S’Express, 1988) élevait le house à l’échelle internationale avec leurs collections d’échantillons, Lords Of Acid faisait vibrer les sous-sols belges avec des synthétiseurs et une diva qui chante sa sexualité. I Sit On Acid commence littéralement avec « Darling come here, fuck me up the. » et le rythme EBM assure la suite, celui-ci accompagné de sons de synthèse distorsionnés.

C’est à ce niveau que LoA se démarque du acid house de Chicago, et d’un classique comme Acid Tracks (1987) de Phuture par exemple. La pièce ne tourne pas autour de la basse synthétique du Roland TB-303, bien que l’on sente la teinte acid; la base house ne vient pas du disco et de l’échantillonnage, mais bien du new beat, une forme de EBM au ralenti. L’ajout de paroles déclamées par Praga Khan et/ou Jade 4U sous forme de couplets et refrains complète l’identité sonore du groupe, et permet d’offrir un bon show burlesque dérisoire.

Lust a sitedemo.cauit cinq simples publiés entre 1988 et 1992, donc Hey Ho!, troisième piste de l’album qui mérite au moins une écoute. Au final, trois pièces sur quinze qui valent le détour, ça me rappelle que l’acid house a mal vieilli, que la palette sonore s’est court-circuitée et a fini par saturer son public. Je dois vous avouer ne pas avoir été capable de réécouter l’album au complet, donc je ne vous tiendrai pas rigueur si vous ne vous contentez que des trois pistes recommandées. Album de nouveau enterré.