Concerts

Le Festif de Baie-St-Paul 2015

LCA_LeFestif_RadioRadioC’est jeudi dernier (le 23 juillet pour être précis) que Mademoiselle Rouge et votre humble scribe avons pris la route en direction de la magnifique ville de Baie-St-Paul situé dans la région de Charlevoix. Jusque dans la conservatrice ville de Québec, le paysage est assez morne merci, mais au-delà de la capitale nationale, c’est du bonbon! En révisant l’alignement des artistes regroupés lors de la sixième édition du Festif de Baie-St-Paul, on s’attendait à en voir de toutes les couleurs… et on peut dire sans gêne qu’on en a eu plein les oreilles.

À la scène Desjardins, la première journée regroupait la formation pop-orchrestrale Groenland, l’auteure-compositrice-interprète Marie-Pierre Arthur et le bon vieux bouc de Robert Charlebois qui nous présentait pour la énième fois son vieux stock. Même si la musique de Groenland ne constitue pas vraiment pas notre tasse de thé, la prestation offerte était irréprochable, particulièrement la performance vocale de Sabrina Halde; une chanteuse d’exception. Par la suite, Marie-Pierre Arthur a arpenté la scène avec assurance et même si son dernier album nous avait laissés de marbre, il faut avouer que la musicienne est éminemment compétente et que le band de feu qui l’accompagnait a fait le travail à la perfection… le claviériste François Lafontaine en tête de liste.

Le vrai Garou, Robert Charlebois, avait l’honneur de clore la soirée. Bon. On entend déjà les fines bouches nous dirent que le bonhomme est fini, mais on a de petites nouvelles pour eux! À 71 ans bien sonnés, l’artiste a revisité ses plus grands succès avec une énergie étonnante appuyée par un septuor exceptionnel composé d’une section de cuivres hallucinante. La voix était juste, le «bougalou» était en feu et on est sorti de ce concert abasourdi par le professionnalisme démontré par le vétéran. Coup de cœur pour Mon pays (ce n’est pas un pays c’t’une job)… texte encore d’actualité, il va sans dire!

Plus tard, on a traversé la rue afin de nous rendre au sous-sol de l’église. Sweet Grass et Bernard Adamus nous y attendaient. Si Sweet Grass fait souvent penser à un Fleet Foxes bien de chez nous, le quintette saguenéen possède un fichu de beau potentiel. S’agit pour eux d’aligner les concerts et on pourrait assister à l’éclosion d’une formation folk hippie (et ce n’est pas péjoratif!) de bon calibre. Et que dire de plus qui n’a pas déjà été dit au sujet de Bernard Adamus? Cet homme a encore une fois fait lever le party comme pas un! On a même chanté Brun (la couleur de l’amour) dans notre sommeil!

LCA_LeFestif_FredFortinPour la journée de vendredi, une surprise de taille nous attendait. Puisque l’on pouvait télécharger aisément l’application mobile du Festif, on a pu suivre les différents concerts-surprises offerts aux quatre coins de la ville. Une idée de génie! C’est avec un enthousiasme digne de jeunes adolescents imberbes qu’on s’est dirigé vers le caveau de l’Accommodation Baie-St-Paul (un simple dépanneur) afin d’assister à une prestation d’un de nos chouchous: Fred Fortin. En format homme-orchestre, le sympathique barde a enfilé les Robbeur, Madame Rose, Le mur et plusieurs autres pièces avec un lâcher-prise charmant. Gros boum-boum pour la relecture de Sweet Virginia des Stones. Merci mille fois Fred!

LCA_LeFestif_PhilippeBPar la suite, on s’est rendu à la scène Hydro-Québec sur laquelle Mara Tremblay officiait. Accompagnée par l’excellent Sunny Duval, l’artiste y est allé d’une prestation résolument rock… et c’est dans ce format et cet état d’esprit qu’on affectionne l’émouvante Mara. En fin de journée, on a déménagé nos pénates à la scène du Chapiteau afin d’entendre Philippe B nous proposer ses charmantes ritournelles douces-amères. À chaque fois, qu’on entend le chansonnier en concert, on pense immédiatement à Mark Oliver Everett (Eels)… et c’est le plus beau des compliments qu’on puisse offrir à Philippe B. Après un succulent repas au restaurant Le Mouton Noir, on a assisté à la solide prestation des Planet Smashers qui ont réussi à faire poser sur le bitume les fesses de milliers de fanatiques avant d’entonner une chanson. Fort sympathique! Par contre, on a bien essayé d’apprécier à sa juste valeur la musique de Reel Big Fish, mais peine perdue, notre ADN musical n’est absolument pas conçu pour ce faux ska-punk qui dénature le genre au plus haut point. On est passé rapidement à un autre appel.

LCA_LeFestif_GalaxieEt celui-là, on va s’en souvenir pour longtemps! Massé au-devant de la scène du sous-sol de l’église, on attendait de pied ferme la prestation de Galaxie. Pendant plus d’une heure, les salopards menés par le guitariste-chanteur Olivier Langevin, qui lui-même était soutenu par l’éternelle section rythmique béton composée de Fred et Pierre Fortin (incluant les claviers dérangés de François Lafontaine, une choriste drôlement efficace et un percussionniste), nous ont gratifié de leur stoner rock cadencé avec une adéquation qui fait peur. Ce groupe-là n’a rien, mais strictement rien à envier aux grandes pointures du genre. On a capoté raide sur Baron et le public a carrément explosé durant Piste 1. Concert d’anthologie! On est sorti de là totalement lessivé; Mademoiselle Rouge avait les tibias bleus et votre vieux punk préféré est reparti avec son chandail du Jon Spencer Blues Explosion trempé bord en bord. Wow!

On a terminé la soirée au Centre Communautaire en compagnie de notre pamphlétaire préféré: Mononc’ Serge. En format trio, Serge Robert a commencé le spectacle avec Les patates et on a quitté les lieux après l’excellente Coupe Couillard durant laquelle il faisait bon de voir tous ces festivaliers hurler en choeur avec Mononc’. L’heure du dodo avait franchement sonné!

LCA_LeFestif_AntoineCorriveauPour notre dernière journée, on s’est dirigé d’un pas lent vers le bucolique quai de Baie-St-Paul où Antoine Corriveau prenait l’affiche. On vous le répète les mélomanes. Ce gars-là est l’un des futurs monuments de la chanson québécoise. Les relectures de Printemps, Printemps et Le temps des coupes à blanc étaient transcendantes et le conflit entre l’atmosphère élégiaque sitedemo.caiguée par les chansons de Corriveau et la beauté du paysage nous a carrément jeté sur le cul. Sans mot!

Ensuite on a bifurqué de nouveau vers la scène Hydro-Québec pour aller entendre l’électro/hip-hop métissé de Pierre Kwenders. D’une originalité indéniable, la performance manquait curieusement un peu de rythme, probablement causé par un «pacing» un peu déficient, mais qu’à cela ne tienne, ce musicien de talent crée un genre vraiment singulier. On dit bravo à ça!

Pour notre dernière soirée à la scène Desjardins, on avait droit à Radio Radio, Alex Nevsky et Les Trois Accords. En ce qui concerne Radio Radio, de notre côté, on est preneur. Pourquoi? Parce ces gars-là proposent des «hooks» imparables avec une attitude rassembleuse irréprochable (mais pas racoleuse). Oui, il y avait de la place en masse dans notre jacuzzi!!! Par contre, la prestation d’Alex Nevsky était d’une navrante platitude. Préférant jouer à l’animateur de foule plutôt que de miser sur le «musicianship» de son groupe, on s’est retrouvé devant un paquet de temps morts et des blagues/concepts qui tombaient sérieusement à plat. On comprend que le jeune homme n’a qu’un seul album au compteur, mais au lieu de jouer au Patrice L’Écuyer des pauvres, l’énergie devrait être mise au service de la musique. Très dommage!

En contrepartie, voilà un groupe qui a travaillé fort pour s’améliorer et qui aujourd’hui récolte pleinement les fruits de son dur labeur: Les Trois Accords. On peut trouver ce qu’ils ont à offrir de très «adolescent», mais ce groupe livre la marchandise sur scène grâce à une panoplie de chansons détentrices d’un potentiel unificateur décuplé. Le concert s’est terminé en apothéose avec Retour à l’institut qui rassemblait tous les artistes qui ont joué durant la journée. Un autre beau moment!

On a finalement terminé la soirée à l’incontournable sous-sol de l’église avec Chocolat et We Are Wolves. D’entrée de jeu, on fait un énorme mea culpa. L’album Tss Tss aurait dû faire partie de nos meilleurs crus de 2014. Là-dessus, on s’est gouré. La prestation? Du rock psychédélique/garage de calibre international qui évoquait autant Deerhunter que Foxygen. Notre deuxième coup de cœur du festival. La bande à Jimmy Hunt a brassé la cage des festivaliers présents offrant autant de vieilles chansons que l’essentiel de son dernier album. Est-ce qu’il y a un public pour ce genre musical au Québec? Pas certain. Mais de l’autre côté de la grande flaque, la sauce pourrait prendre. Une véritable révélation!

Notre Festif s’est terminé avec une performance très punk du trio We Are Wolves ponctuée d’une coupure de son, de l’intervention d’un ambulancier auprès d’un mélomane en proie d’un malaise, d’une reprise éloquente de Paranoid de Black Sabbath et d’un moment de grâce qui a vu le chanteur-bassiste Alexandre Ortiz monter sur les épaules d’un mastodonte… qui semblait avoir hâte que ça finisse. Comme vous pouvez le constater, ça brassait solide. Et ça s’est terminé ainsi!

En passant, on salue bien bas la qualité et l’éclectisme de la programmation, mais on offre une génuflexion bien sentie à tous ces sympathiques bénévoles que l’on a croisés tout au long de notre séjour. Du travail de pro! Relativement à «l’expérience festivalière», on admet qu’elle est tout simplement magistrale. Les concessions alimentaires sont délectables, la bière locale coule à flots et les scènes sont parfaitement bien situées. Que dire de ces concerts-surprises et de ces entractes à la scène Desjardins, marquées entre autres par la prestation enjouée d’un «marching band» en provenance du Rhode Island.

Bref, Le Festif de Baie-St-Paul tient bien en main un joyau qui a tout le potentiel nécessaire pour passer à un niveau supérieur tout en demeurant accessible à tous. Bravo à toute l’équipe! Vous pouvez être fiers de vous! On sera de retour l’an prochain! Promis, juré, craché!

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