J’ai découvert le compositeur Jean-François Blouin avec sa pièce Vent solaire (2014), parue sur Totem Électrique II en février dernier. Composée à partir de la Table de Babel de Jean-François Laporte, la palette sonore met de l’avant un contraste entre la chute libre et l’équilibre; un bon souvenir. Il y a également eu l’album Abtu & Anet (2011), en duo avec Benoit Rolland, qui offre une expérience musicale électro psychédélique, genre. Blouin était de retour en mars dernier en solo avec un joli album intitulé Lieues de résonances, publié sur l’étiquette Kohlenstoff.

Le thème principal prend immédiatement son sens sur Scordatura, pièce composée en duo avec la violoncelliste Émilie Girard-Charest. Les pincements de cordes de guitare se mêlent aux frottements de cordes de violoncelle dans un espace à géométrie variable. Les traitements sonores font passer les instruments d’un lieu réel à un lieu virtuel discrètement, et brouillent la frontière avec les performances.

Nature Morte fait d’abord penser à du «field recording» trafiqué, comme si les échantillons étaient passés lentement dans un broyeur numérique. Les passages saturés ponctuent une atmosphère de forêt possédée, habitée par des rythmes d’insectes et des pads vaporeux.

Solo prend sensiblement la même approche que la première pièce, à la «stick bass» cette fois-ci. La combinaison du ronronnement des notes graves et de la dissonance des notes aigües nous amène dans un cimetière nautique, où les structures en bois se courbent et craquent selon les mouvements de l’archet.

Blouin reprend la «stick bass» sur Chants Magnétiques, en duo avec Matthias Soly-Letarte aux percussions fixées sur bande audio. Ce dernier ajoute une sonorité industrielle aux grondements de la «stick bass», l’atmosphère est sombre et inquiétante, comme du bon vieux Neubauten.

Lieues de résonances porte évidemment bien son nom, le rôle confié à l’espace et l’effet de réverbération est équivalent à celui d’un instrument. On ressent surtout à quel endroit Blouin a envie de nous amener, sans tout le temps comprendre pourquoi tel son ou tel passage nous y amène. Le montage est superbe, et peut parfois bousculer comme un tournant de montagne russe; les oreilles ont peur pendant une fraction de seconde, mais retrouvent immédiatement leur enthousiasme.

Ma note: 7.5/10

Jean-François Blouin
Lieues de résonances
Kohlenstoff Records
55 minutes

https://kohlenstoffrecords.com/artists/jean-francois-blouin/

http://kohlenstoff.ca/album/lieues-de-r-sonances