Critiques

Porches

The House

  • Domino Records
  • 2018
  • 35 minutes
8
Le meilleur de lca

Moins de deux ans après la parution remarquée de Pool et du EP Water, la formation américaine Porches rapplique avec un troisième album en carrière, poussant plus en avant ses explorations sonores. Si Pool se déclinait comme une bonne parution « chillwave », sous une pop vaporeuse, mais parfois facile, The House cherche un peu plus loin sans nécessairement devenir inaccessible ou confus. Et c’est là que réside la force de cet album : une sortie bien en dehors d’une zone de confort trop restreinte pour une formation américaine qui commence pourtant à connaître un bon succès avec une formule sur laquelle elle ne veut pas se reposer inutilement.

Dès les premières notes de The House, on ressent un certain bris de continuité. Des voix dédoublées, des rythmes plus complexes qu’un simple groove de basse confortable, mais facile : c’est ce que nous offre Leave the House, sur une belle analogie musicale. La suite nous recentrera peut-être un peu plus sur ce que Porches faisait de bien dans les dernières années, mais en gardant un certain déséquilibre grâce à des interludes pertinents et des influences plus variées.

Sortant des limites du « chillwave » à la Toro Y Moi pour un son qui ne déplaira pas aux fans des Dirty Projectors, la bande d’Aaron Maine a en effet décidé de collaborer avec plusieurs gros noms de la musique américaine, et ce pour le mieux. Il serait faux de dire que c’est dans l’espoir de se faire remarquer par le grand public avec un  featuring appétissant : Porches ne tombe pas dans ce piège. Les collaborateurs, dont font notamment partie Dev Hynes (Blood Orange) et Alexander Giannascoli ((Sandy), Alex G), ne sont déclarés que comme des aides à la composition dans le livret de l’album. De même que le matriçage, exécuté de main de maître par Chris Coady, un collaborateur de longue date de Beach House et TV on the Radio, n’est pas vanté plus qu’il ne le faut. Porches et Maine savent ce qu’ils sont capables d’offrir et y vont à fond pour nous envoyer un message clair : le groupe a du talent et sait écrire de la bonne musique.

Et on le ressent, du moins sur certains moments forts de l’album, comme W Longing ou Anymore, où « house » compressée, autotune et rythmes vaguement « afrobeats » se côtoient sans anicroche. L’album traite de dépaysement, de maturation, de renouveau et de la conscience de son propre ego chez le chanteur en louvoyant aisément sur des thèmes qui pourraient toutefois devenir pompeux rapidement. Mais non, l’introspection réaliste est au rendez-vous, n’excluant pas pourtant des passes plus dansantes et sautées.

Comme je le disais plus tôt, Pool avait l’avantage d’être évident. Un album soigné avec de bonnes lignes de basse, un renouvellement électronique et une inscription évidente dans une atmosphère pourtant toujours de mise. Mais The House propose justement plus! Il ne vise pas juste à tout coup, non. Certains moments sont moins forts que d’autres, mais c’est ce qui lui confère justement un caractère beaucoup plus humain, plus vrai. Sans une trop grande linéarité, qui me dérangeait justement sur les opus précédents de la formation, The House se renouvelle et ose, chose que je souhaite voir chez plus d’artistes de la nouvelle vague pop américaine.