Critiques

Jeff Rosenstock

Post-

  • Polyvinyl Records
  • 2017
  • 40 minutes
7,5

Le premier janvier est toujours une journée à classer dans la catégorie « lendemain de veille ». Avec quelques amis bien choisis, qui ont le cœur et le corps à la fête, je célèbre toujours la venue de la nouvelle année avec un certain débordement. Lorsque l’année commence, je suis heureux, mais assez abîmé… Mais l’industrie musicale, elle, ne prend jamais de pause. Elle doit s’adapter au rouleau compresseur économique – et aux consommateurs voraces que nous sommes tous devenus – produisant ainsi une quantité astronomique de disques… ce qui fait qu’un rockeur comme Jeff Rosenstock lançait dès le premier jour de l’année en cours, et dans un anonymat assez révélateur, son troisième album solo en carrière, intitulé Post-.

Comme la majorité de ses semblables, Rosenstock a fait partie d’innombrables projets, enfantant au passage plusieurs albums. En plus d’avoir été le chanteur de la formation ska-punk The Arrogant Sons of Bitches, d’avoir été membre du collectif Bomb the Music Industry ! et d’être une composante en règle de la formation indie-rock Kudrow, le bonhomme a trouvé le temps d’amorcer une carrière solo. Après We Cool paru en 2015, le musicien décrottait les oreilles de plusieurs fanatiques de power-pop avec l’excellent Worry ! (2016); création qui explorait les thèmes de l’embourgeoisement, des inégalités économiques grandissantes et de la brutalité policière.

Cette fois-ci, Rosenstock nous propose un album dédié aux lendemains politiques qui déchantent. On ne s’en sort pas. L’élection du clown qui sert de président à nos voisins du Sud a anéanti le compositeur et plusieurs de ses compatriotes. En titrant son album Post- (notez le trait d’union suivi d’un néant linguistique), l’artiste souligne simplement le désenchantement normal qui suit un tel résultat électoral; un dénouement improbable qui place un peuple dans une position inconfortable, devant un avenir possiblement compromis…

Musicalement, Rosenstock nous propose un petit dépoussiérage de deux genres musicaux qui en avaient grandement besoin : la pop punk et la power-pop. S’inspirant de groupes comme Green Day ou encore Weezer, il garde intacte l’allure unificatrice des mélodies qui ont toujours caractérisé la musique de ces deux formations. Là où il tire réellement son épingle du jeu, c’est qu’il ajoute aux habituels tics mélodiques qui peuvent agacer (le côté gnangnan et enfantin du genre) des éléments sonores issus de la dream pop. Voire ici, l’intermède vaporeux situé à mi-chemin de l’excellente USA; un morceau de bravoure d’une durée de près de huit minutes. Une totale réussite.

Avec une urgence essentielle, une réalisation parfaitement crade, une interprétation hargneuse et une certaine ambition de renouveler le genre, Jeff Rosenstock nous balance un vrai bon disque de power-pop aux accents punks. Difficile de résister à la « pixie-esque » All This Useless Energy, au petit penchant Nada Surf (en moins raffiné) entendu dans Melba ainsi qu’à l’authentique déchaînement transmis par Beating My Head Against The Wall.

Post- est une véritable leçon d’intensité, d’intégrité et d’insouciance lancée à tous les Rivers Cuomo de l’univers qui, par paresse ou par manque d’inspiration, domestique trop souvent ce genre musical. L’année rock est bien partie !

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