Critiques

Gaz Coombes

World’s Strongest Man

  • Gaz Coombes LTD
  • 2018
  • 42 minutes
8
Le meilleur de lca

Meneur de la formation britannique Supergrass (de 1995 à 2008), Gaz Coombes a officiellement amorcé sa carrière solo en 2012 avec un Gaz Coombes presents… Here Comes the Bombs assez réussi. Mais c’est avec sa deuxième offrande, le superbe Matador (2015), que le multi-instrumentiste a attiré l’attention de la presse spécialisée; disque nommé dans la longue liste du Mercury Prize. Une sélection entièrement méritée. Ce remarquable foutoir sonore assez sophistiqué — alliage de pop, de krautrock et d’électro-pop — a obtenu une reconnaissance assez confidentielle de ce côté-ci de la grande flaque. Rien de bien étonnant là-dedans…

La semaine dernière, Coombes nous proposait World’s Strongest Man : un album inspiré de l’essai The Descent of Man du Britannique Grayson Perry; manifeste portant sur la masculinité moderne et ses conséquences funestes pour l’avenir de l’humanité. Le titre de l’œuvre est un clin d’œil sarcastique à ce cher Darwin qui avait publié à la fin du 19e siècle, The Descent of Man, and Selection in Relation to Sex. Coombes déboulonne toutes les idées reçues autour de la masculinité (l’homme de 42 ans est marié et père de trois filles). World’s Strongest Man marque aussi la rupture définitive de l’artiste avec le son de son ancienne formation.

Mais soyez sans crainte, les guitares sont toujours présentes même si elles sont un peu plus domestiquées. L’ensemble évoque souvent le meilleur de Radiohead (celui d’In Rainbows) qui, combiné à une sorte de pop-rock raffiné, bourré de nuances et mélodiquement de haute voltige, propulse la crédibilité de Coombes à un niveau inégalé. Ce nouvel album comprend quelques ascendants passéistes issus de la brit-pop, mais ceux-ci sont assez bien camouflés par tous ces arrangements résolument modernes (rythmes électros, claviers aériens, etc.). La pièce titre, présentée d’entrée de jeu, est un exemple probant de cette astucieuse mixture.

Honnêtement, si ce disque-là ne récolte pas sa juste part d’éloges, je devrai me faire décrotter les oreilles chez mon ORL. Ce disque est une totale réussite. Gaz Coombes est un artiste qui a toujours dû se contenter d’un succès d’estime comparativement à tous ses acolytes, produits de la brit-pop (Gallagher, Albarn, Cocker, etc.). Ce gars-là est un talent supérieur et il en fait l’éloquente preuve avec ce World’s Strongest Man.

Ce disque s’écoute du début à la fin sans interruption et ne contient aucune pièce faiblarde. Mes préférés ? L’émouvante et frémissante ballade pianistique — qui se conclut en un crescendo aussi lumineux que bruyant — intitulé Slow Motion Life. Une grande chanson. Oxygen Mask détient quelques liens sonores avec Grizzly Bear. In Waves fait penser au Radiohead d’In Rainbows et Vanishing Act est un puissant rock orchestral.

Honnêtement, l’année 2018 est peut-être l’année de la réconciliation quant à la relation fielleuse que j’entretiens depuis de nombreuses années avec le pop-rock. Coup sur coup, je fus séduit par les plus récents albums de Speedy Ortiz, Hop Along et voilà que Gaz Coombes catapulte ce qui pourrait bien être son grand disque.

Ceux qui l’ont découvert sous la bannière Supergrass seront subjugués du chemin parcouru. Un très sérieux compétiteur à Damon Albarn.

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