Critiques

Emptyset

Borders

  • Thrill Jockey Records
  • 2017
  • 30 minutes
7,5

Emptyset est un projet électro formé de James Ginzburg et Paul Purgas, fondé en 2005 comme outil de recherche sur la musique expérimentale et l’art conceptuel. Leur premier album homonyme publié en 2009 mettait la barre très haute avec un design sonore et un mixage d’une précision chirurgicale, placé très près des oreilles; comme une forme de minimalisme créé pour défier les tympans. Demiurge (2011), Medium (2012) et Recur (2013) se sont suivis en conservant le même niveau de brutalité et de saturation, en se concentrant sur la rythmique parfois techno, parfois chaîne de montage. Le duo nous revient quatre ans plus tard avec leur cinquième album, Borders, et onze pièces tout aussi crues, enregistrées en direct dans des lieux bien réverbérés

Body se forme d’une note saturée jouée en boucle, accompagnée par un « kick ». On porte attention aux variations de fréquence de filtrage et à la façon dont la réverbération du lieu réagit. Border passe en trois temps, comme une valse industrielle dont le filtrage détermine également la ligne mélodique, des basses aux hautes pour celle-ci. Descent commence par une grosse note, laisse plus d’espace à la distorsion et au feedback; le rythme part ensuite sur quatre temps, à l’oriental, avec un jeu de notes à l’octave. Across sature complètement les oreilles en jouant les notes en double-croche, avec le même niveau de saturation et de distorsion que les précédentes; on prend une petite pause.

Speak contraste heureusement avec la clarté du traitement sonore, on entend les cordes de la « cithare augmentée » à travers les effets et la réverbération. Axis reprend la longue note à partir de laquelle la mélodie se développe rythmiquement, le grésillement de la distorsion et les harmonies résultantes sont superbement bien montées. Sight est étonnamment plus douce, presque atmosphérique, comme une scène finale de confrontation (dans une usine évidemment).

Retrieve retourne à la note solo trafiquée, le filtrage reste pas mal dans les basses et joue surtout sur le niveau de résonance du traitement; on ressent un grondement profond provoqué par la vibration agressive de l’instrument. Ascent débute par quatre « kicks » auxquels répond une corde, pour reprendre momentanément la forme de Body, et retourner à l’action/réaction du « kick » et de la corde. Ground multiplie les notes comme sur Across, et bien que l’intention passe résolument, c’est toujours aussi lourd sur les oreilles. Dissolve fait la même chose, mais sans autant d’effets, on entend davantage les cordes jouées au-dessus du « kick »; l’ajustement rend la somme bien plus équilibrée.

Borders n’est pas l’album le plus facile qu’Emptyset nous ait offert jusqu’à maintenant. Le fait de se concentrer sur un instrument à cordes augmenté, un « kick » et du traitement sonore joué en direct ajoute à l’impact de chaque pièce, mais nécessite un volume d’écoute bien plus élevé pour prendre tout son sens. On en perd un peu en subtilité et en tours de magie effectués en studio. Malgré cela, une fois que l’on apprécie la démarche autant que le résultat, Borders devient une jolie trame noise minimaliste de l’ère industrielle.

Ma note: 7,5/10

Emptyset
Borders
ThrillJockey
30 minutes

http://emptyset.org.uk/