Critiques

Anjou

Epithymia

  • Kranky
  • 2017
  • 57 minutes
8
Le meilleur de lca

Anjou est le projet électro expérimental de Robert Donne et Mark Nelson, deux ex-Labradford (bassiste et guitariste respectivement) qui ont décidé de prendre un virage plus électro, tout en conservant une part de leurs origines drone rock et post-rock. Le duo états-unien, en collaboration avec le percussionniste Stephen Hess, nous avait offert un premier album homonyme à l’automne 2014, huit pièces solidement montées, dont l’atmosphère, m’avaient laissé une impression d’abri antinucléaire abandonné. La chaleur des sons analogiques amenait un contraste à cette froideur, et créait une dualité qui allait servir de ligne directrice à un album très équilibré et homogène. Le même effort a été réalisé pour Epithymia, leur deuxième opus sorti en mars dernier, avec un ajustement de température penchant vers le bain de soleil, bien étendu sur le toit de l’abri.

Les différentes vitesses d’oscillation analogique ouvrent Culicinae, comme du rétro-ambient duquel on ressent la chaleur de l’amplification à lampes. Ça frôle le minimalisme, mais les changements sont tout de même assez rapides pour parler de passages différents. Les cymbales réverbèrent pendant un instant jusqu’à ce qu’une épaisse strate de synthés vienne remplir le spectre des fréquences. Le mouvement bouge comme des vagues qui se désintègrent progressivement en noise de circuits. Greater Grand Crossing ouvre sur un grand espace vaquant dans lequel les événements sonores se succèdent, comme des échos de civilisation perdus dans un réseau de tunnels souterrains. L’arpège synthé en boucle de Soucouyant nous ramène dans les trames sonores de dessins animés 70s. C’est légèrement psychédélique et totalement hypnotisant. Les variations en intensités et les effets de filtrages forment le phrasé et renouvellent la combinaison des différentes harmoniques.

An Empty Bank agrandie davantage l’espace sonore dans lequel évolue la mélodie. On retrouve une froideur nordique mélangée à une trompette jazz qui génère à elle seule la trame sonore d’une scène de crime de thriller policier. La strate saturée au clavier embrouille la séquence, la rend plus dense et agressive, pour finalement se dissiper en bruine. On retourne dans les catacombes d’un réseau de transport abandonné avec Glamr; les roues des trains réverbèrent encore dans les tunnels après plusieurs décennies d’inutilisation. La distorsion post-rock revient sur Georgia, bien salie et réverbérée comme une cloche qui clame au sommet d’une église. Les accords se réassemblent en fondus enchaînés, texturés par des crépitements et des interférences radio.

Epithymia est clairement plus doux pour l’oreille que le premier album, dont une bonne part du drone/noise est remplacé par de la synthèse analogique harmonieuse et satinée. On ressent davantage de chaleur, comme un feu de foyer qui irradie sa présence, mais on n’oublie quand même pas la solitude du bunker sibérien. Journée ensoleillée dans un espace/temps post-apocalyptique, Anjou nous fait croire qu’il y a peut-être un futur post-guerre nucléaire.

Ma note: 8/10

Anjou
Epithymia
Kranky
57 minutes

http://www.kranky.net/artists/anjou.html

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