Chroniques

Entrevue à coeur ouvert avec La Femme

508708-la-femmeLa semaine dernière, j’ai eu la chance de m’entretenir avec Sacha Got, guitariste qui manie aussi le thérémine chez La Femme. Le groupe français a fait paraître Mystère, leur deuxième album, le 2 septembre dernier. Depuis la parution de l’album, ils ont reçu leur part d’éloges et la formation est très contente de la réception: «En France, on a eu plein de bonnes critiques et une bonne presse. Après, forcément, ils nous affichent partout et ça énerve certaines personnes. Nos amis ils aiment et c’est bien.»

Sur Mystère, les thèmes de l’amour et les problématiques emblématiques de la vie de jeunes adultes sont très présents. «Il n’y avait pas de thématique précise. Il y a des morceaux qui ont été écrits il y a quatre ou cinq ans alors que d’autres sont plus récents. On a regroupé les morceaux qui étaient les plus aboutis et puis on a cherché une cohérence dans le tracklisting.» On remarque que les difficultés et les lassitudes des relations humaines et amoureuses prennent une grande place sur le nouvel album, plus encore que sur Psycho Tropical Berlin. «Oui, il y a de la lassitude dans certains morceaux. Ça parle d’amour et ce n’est pas toujours positif, mais il y a toujours une petite note d’espoir qui dit que finalement ce n’est pas si grave et il faut passer à autre chose. Comme sur Où va le monde par exemple.» Il faut dire qu’ils écrivent d’abord et avant tout sur ce qui les entoure et ce qui fait partie de leur quotidien. La vingtaine sert à faire des expériences et les amours déchus sont un bon moteur de création. «Ça se fait naturellement. Ce sont des sujets sur lesquels on réussit à écrire facilement et lorsqu’on vit des déceptions amoureuses, on a envie d’écrire des chansons. On a envie d’écrire des choses, de répondre. Parfois, il y a une sorte de vengeance dans les mots, une façon d’exorciser tout ça.»

Le groupe ne se définit pas pour autant comme étant ancré dans la vingtaine. «C’est logique puisqu’on est dans la vingtaine. J’ai l’impression que c’est des situations qui arrivent dans la trentaine et la quarantaine aussi. Par exemple, Serge Gainsbourg, il a écrit sur ce sujet jusqu’à très tard. Ce n’est pas une histoire d’âge, mais une histoire de personnes et chacun parle de ce qu’il veut en chanson. Pour nous, ça vient tout naturellement. En même temps, peut-être que dans quelques années, je pourrai te dire: ah oui dans la vingtaine, on était plus comme ça.»

On remarque un certain cynisme et quelques moments assez noirs sur Mystère. Sacha y voit simplement le reflet de la réalité. «On a beaucoup plus de morceaux réalistes sur cet album que sur le premier. Nous avons encore des fictions, mais elles sont ancrées dans des moments vrais.» Parmi les morceaux où l’espoir se fraie un chemin plus clair, on retrouve Septembre, tourné vers le futur et l’espoir de la nouveauté. Il y a aussi Tatiana qui dessine la rencontre de quelqu’un dans une boîte de nuit. «Tout est lié, l’amour ça naît souvent de quelqu’un qu’on rencontre dans une soirée et qu’on est bourré. Et puis, parfois, ça se transforme en amour et en relation. Ce qui est bien, c’est cette évolution de la fraîcheur des débuts puis le temps qui passe, les doutes qui s’installent et la jalousie. Ces choses-là. Après, Tatiana, ça traite de légèreté et ce morceau a plus de gaieté parce qu’il est seul dans la rue, mais il pense à cette fille.»

Marlon Magnée, autre membre central du groupe, avait dit en entrevue avec Les Inrocks: «Sphynx, c’est typiquement la fête. Mais au-delà de ça, c’est aussi une chanson qui propose une idée: si tout le monde prenait un acide un jour dans sa vie, le monde serait peut-être davantage en paix.» Sacha tient cependant à modérer: «C’est une phrase facile, mais on a tenu à corriger le tir par la suite. Ça ne va pas à tout le monde les acides. C’était une façon de parler. Si tu es dans un état d’esprit ouvert à la nature, à l’art, ça peut être une expérience formidable, mais on n’incite pas les gens à en prendre. C’est tout simplement que le morceau (Sphynx) commence par ça et c’est pour donner un contexte. Il ne faut pas les prendre pour combler une tristesse. On voit ça souvent les gens qui noient leur chagrin dans l’alcool et la drogue. On essaie de prendre ça dans un état d’esprit d’expérience et festif. Faut se sentir bien à la base. C’est la même chose avec l’alcool.»

La Femme revient au Québec avant de cheminer vers les États-Unis où le groupe fait tranquillement sa marque. D’ailleurs, ils font la première partie de Red Hot Chili Peppers lors de plusieurs dates de leur tournée européenne. «On a commencé à tourner là-bas au début du groupe lorsque personne ne nous connaissait. De fil en aiguille, on s’est construit un public fidèle. Maintenant, on fait des bonnes salles et il y a un public qui est là pour nous. C’est un pays avec tant de grands groupes qui ont eu une grande influence sur nous. C’est un vivier extraordinaire.»

La Femme a résolument le vent dans les voiles et se taille une place enviable dans le paysage musical français et mondial. Les spectacles de La Femme sont toujours très dynamiques et débordants d’une folle énergie. Ta prochaine chance de les voir à l’œuvre est le 21 octobre prochain au Théâtre Fairmount et ça vaut vraiment le détour.

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