Critiques

Bat For Lashes

The Bride

  • Parlophone Records
  • 2016
  • 55 minutes
8
Le meilleur de lca

Bat For LashesLa Britannique Natasha Kahn est Bat For Lashes. En novembre 2012, elle avait fait paraître l’excellent The Haunted Man; un disque de «désencombrement» totalement minimaliste qui mettait l’accent sur l’émotion pure plutôt que sur la surenchère sonore. Par ici, c’est toujours apprécié. Pour les non-initiés, sachez que Khan n’est pas un pied de céleri, car elle possède à son actif deux créations sélectionnées sur la longue liste du prestigieux prix Mercury: Two Suns (2009) et Fun And Gold (2006)… et l’artiste ne chôme jamais puisqu’elle fait également partie de la formation krautrock/psychédélique Sexwitch.

La semaine dernière, Bat For Lashes était de retour avec un 5e album studio intitulé The Bride: un album-concept qui raconte l’histoire d’une fiancée éplorée par la perte de son futur mari tué dans un accident d’automobile… en route vers l’église, le jour du mariage. Pas jojo, tout ça. Et en effet, Khan nous invite à vivre le deuil de cette femme qui décide d’entamer un «road trip» afin de déboulonner le deuil vécu.

Le piège qui était à éviter pour Khan? Cette propension au pathos qui afflige la plupart des sitedemo.cauctions dites «sensibles». Eh bien, Bat For Lashes catapulte (aux côtés du dernier Money) l’album mélancolique de 2016. Une superbe création où toutes les ambiances éthérées (qui auraient pu amoindrir l’impact de ce disque) sont admirablement camouflées dans le mix laissant ainsi toute la place à la performance vocale de l’année, celle de Natasha Khan. Khan oscille entre retenue et émotion, déambulant sur cette mince démarcation avec un aplomb impressionnant. Un exploit en ce qui me concerne, car elle aurait pu basculer dans un larmoiement désagréable; le personnage inventé incitait grandement à ce genre d’épanchements.

Musicalement, tout comme l’interprétation de Khan, c’est d’un raffinement exemplaire. L’ensemble est au service de cette histoire magnifiquement racontée par cette grande chanteuse. Bien sûr, des liens de filiation musicaux sont à faire avec les univers de Chelsea Wolfe et Lykke Li; la lourdeur gothique de Wolfe et le pleurnichage un peu lassant de Li (particulièrement sur son plus récent album) en moins.

Alors que ce type de conception sonore aurait pu se transformer en une «comédie musicale» invraisemblable, Khan réussit à nous garder captifs du début à la fin. Bref, j’ai embarqué de plain-pied dans ce récit de veuve endeuillée. J’ai ressenti tout au long de l’écoute l’immense tristesse qui arrache le cœur de cette survivante et c’est grâce à la sobriété de Bat For Lashes que ça fonctionne.

Évidemment, ce disque prend tout son sens si vous l’écoutez d’un seul trait, mais il y a quand même quelques chansons qui valent la peine d’y retourner à répétition. Je pense à la ténébreuse (orgue prenant en introduction) In God’s House, la ballade pianistique If I Knew et Sunday Love, la pièce la plus animée de ce The Bride. Et que dire de cette frémissante réussite que constitue Close Encounters? Je vous mets au défi de rester complètement de marbre à l’écoute de cette ode à un amour perdu. Ouf.

Si vous n’avez qu’un seul disque à vous mettre dans les oreilles, aussi spleenétique que rassembleur, je vous suggère fortement The Bride. Rares sont les artistes en mesure de nous raconter une histoire aussi touchante sans se répandre dans une émotivité excessive. Khan habite son personnage de superbe manière. On y croit pleinement. Excellent disque.

Ma note: 8/10

Bat For Lashes
The Bride
Parlophone Records
55 minutes

http://www.batforlashes.com/

[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=XBjuJbvqm_Y[/youtube]

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